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 N° 466
 
 
 
    2 octobre 2006
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Pollutions en Afrique

Nicole Bétrencourt et Usher N’Godgo leur écrire

Une affaire qui fait couler de l'encre. Dans la nuit du 20 août dernier, le navire pétrolier « Probo Koala » affrété par deux dirigeants français de Trafigura, en infraction au code de l'environnement, a déversé une funeste cargaison de plus de 400 tonnes de boues de déchets pétroliers  dans plusieurs décharges publiques d'Abidjan.
Ce scandale écologique et sanitaire a coûté jusqu'à ce jour la vie à 7 personnes, dont une fillette de 9 ans morte de détresse respiratoire, et une autre de 4 ans morte en réanimation.  66 personnes ont du être hospitalisées.  Plus de 40 000 personnes sont venues consulter dans les 32 structures  sanitaires chargées de gérer la crise des déchets toxiques et qui ne désemplissent pas. 9000 personnes ont déjà été affectées par les eaux usée. L'ONU a fourni une première aide de 38 000 €uros (25 millions de CFA) pour équiper en médicaments les structures. 

retrouver la confiance

Soit 1187 euros par structure, ce qui laisse rêveur. Les victimes se plaignent en général de maux de ventre, de tête , de vomissements, d'éruptions cutanées, de diarrhées, de saignements et de rhume. Le ministère ivoirien de la santé enjoint à la population de ne pas céder à la psychose. Difficile quand l'air est irrespirable et pestilentiel. La population est « à bout de nerfs ». La pêche a été interdite, tout comme la vente de fruits et de légumes qui poussent dans les décharges et qui constituent des revenus pour certains riverains.
Ces boues pétrolières sont hautement toxiques et cancérigènes pour l'homme. Il s'agit d'hydrogène sulfuré, de composés soufrés, et de soude caustique. Sur le plan sanitaire, l'hydrogène sulfuré peut provoquer des irritations des muqueuses et voies respiratoires jusqu'à la mort par empoisonnement du sang, en passant par des nausées et des vertiges. La nocivité est très forte sur le plan écologique si ces toxiques atteignent les nappes phréatiques et le milieu marin. Certains polluants pourraient persister dans l'environnement et perturber la chaîne alimentaire.
Les opérations de décontamination par la société française ont débuté le 19 septembre. Les opérations consistent à pomper les déchets, à les isoler dans des cuves puis dans des containers  qui seront expédiés dans des usines de traitement spécialisées en France ou en Europe du Nord. « L'incertitude sur la durée -sept semaines probablement- et sur le coût de la décontamination résulte des inconnues qui continuent de peser sur le nombre de sites, sur l'ampleur réelle des dégâts à l'environnement, mais aussi sur la composition précise des déchets » rapporte le Monde.fr du 21 septembre. 

restaurer la conscience

Pour le réalisateur ivoirien Usher, le scandale était prévisible. Sans complaisance, il décrypte pour nous la politique environnementale de son pays.
Salut les amis de la médecine
  « Ne me parlez plus de déchets toxiques ». Ils ont été accepté et planifié par le district d’Abidjan. Il y a un peu moins d’un mois, le district d’Abidjan passait un communiqué télévisé  pour informer la population que la ville d’Abidjan allait être pulvérisée contre les moustiques. Et elle ajoutait que les éventuelles odeurs d’insecticides étaient sans danger pour la santé. Figurez vous que cette opération n’a jamais eu lieu mais en lieu et place c’est l’odeur des déchets toxiques qui nous a envahi. Le district ne connaissait probablement pas la  toxicité  des déchets, et a voulu rassurer la population sur cette odeur. Malheureusement, c’est plus grave que prévu. La société Tomi qui s’est occupée des déchets appartiendrait en réalité à la première dame du pays. Est ce vrai ? Mais le constat  est que le gouvernement, je veux dire le Président et son premier ministre tergiversent. Tous les présumés fautifs  sont encore libres  comme l'air. Aussi étonnant que cela paraisse, les prétendus  bouillants patriotes restent muets comme des carpes. Eux qui ne ratent jamais aucune occasion pour se faire entendre et voir « se sont curieusement terrés »: pas de déclaration, pas de marche, pas de sit-in. S'il s'était agit de l’ONU ou d’une autre organisation déclarant que l’un des cinq leaders politiques ne serait pas candidat, ils auraient fait une journée ville morte. Je pense que les principaux financiers de ces « Marcheurs Politiques » sont impliqués jusqu’au cou, et cela explique leur mutisme.

renforcer la compétence

Les  déchets toxiques sont devenus au fil des jours une affaire politique. Notre président  s'en est saisi par propagande et pour régler des comptes. Quant à l'opposition, elle applaudit et  voit en cela une occasion de faire plonger le président. 
Voyez vous, ils palabrent autour des malades. Le Premier Ministre a dit en grande pompe qu'il y avait des médicaments pour tous. C'est faux. Si vous avez la chance, vous aurez une tablette de paracétamol. La majorité des personnes qui sont allées consulter dans les structures sanitaires ont du acheter elles mêmes leurs médicaments.
Les fauteurs qui ont autorisé le déchargement des boues toxiques ont  empoché les 17 milliards promis pour cette sale besogne.
Tous les hauts responsables  plaident « non coupable ». Devant les députés, ils crient: « Nous sommes innocents ».
 Le Probo koala serait venu tout seul et serait reparti  tout seul. Par magie, les déchets se sont déplacés tout seuls et ont atterri comme ça sur les sites.
Il faut reconnaître que nous vivons dans « un pays de saleté ». Le mot n’est pas trop fort. Saleté environnementale mais surtout « Saleté morale ». Le mot éthique n’a aucun sens pour beaucoup d'entre nous. Un monde à l’envers. Et tout cela au nez et à la barbe des dirigeants quand ils n’y contribuent pas eux même. La sagesse n’habite pas nos dirigeants. C’est bien dans ce contexte là que je situe le scandale  des déchets toxiques qui fait la Une chez nous. Les maires sont élus tous les cinq ans pour tenir notre environnement propre. Malgré cela, la ville d’Abidjan reste toujours sale. Ce qui offre un cadre propice aux vidanges de toutes sortes,  des déchets étrangers à ceux qui sont toxiques. Mais au delà de l’environnement se profile aisément le manque de civisme, d’éthique pour faire place à une forte cupidité qui nous met sur la liste des pays les plus corrompus. Croyez moi, j’en ai honte et c’est parfois difficile de vivre au milieu de ces politiciens véreux qui ne pensent « qu’à se remplir les poches». Je pense qu’il faut sévir avec la plus grande fermeté car la part est trop belle à l’impunité. Ensuite prendre des résolutions fermes et sanctionner dès que « quelqu'un jette un papier de bonbon par terre ». À mon sens, c'est capital car aujourd’hui, encore il n’est point surprenant de voir des individus se soulager en pleine rue. Notre société s’est complètement déshumanisée. Il faut renforcer l’éducation civique à l’école, l’étendre jusqu’au supérieur, éduquer la population en  faisant passer des spots à la télé.
 Quant à la pollution c’est dans la même veine. Les 80% des taxis sont des pollueurs mais on n’a jamais compris comment et pourquoi ils réussissent à avoir le permis technique qui leur permet de circuler. Hé oui, c’est ça l’Afrique. La corruption à tous les niveaux…

 


Pour ceux qui ne connaissent pas encore notre Charte d’Hippocrate.

Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html




Os court : « Hélas nos politiciens sont soit incompétents , soit corrompus. Quelquefois les deux le même jour. »
Woody Allen


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