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N° 698

 
 

      28 mars 2011
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Dessin de la LEM

 

 

 

 


      
Darwin revisité ?

      Docteur François-Marie Michaut
lui écrire

 

                          


 

   Les drames que subit actuellement le Japon, troisième puissance économique mondiale, sans parvenir à maîtriser les systèmes technoscientifiques qu'il a poussés jusqu'à l'extrême et qui lui ont échappé, nous poussent à nous interroger. Sur quel système de conception du monde nous sommes-nous massivement appuyés d'un bout à l'autre de la planète pour en arriver à ce qui ressemble à une impasse pleine de dangers ?
    Les techniques, y compris bien entendu les médicales, se sont emballées comme si elles échappaient au contrôle humain. Ces techniques viennent toutes de la science, des sciences qui depuis belle lurette ne connaissent plus les frontières de la géographie.
Une rapide enquête montre que la conception scientifique du réel qui nous guide encore est celle issue des travaux de Charles Darwin, fils de médecin et ancien carabin, actualisés par Julian Huxley en 1942(1).
    Depuis 150 ans, sa théorie de l'évolution, modernisée au fil du temps et des découvertes notamment dans le domaine génétique et biochimique, puis cosmologique ( théorie du Big bang), continue à servir de colonne vertébrale à toutes nos disciplines scientifiques. Donc de soubassement idéologique à la plus grande partie de ce que nous faisons quand nous utilisons nos connaissances.

retrouver la confiance

Pour éviter un contresens au propos tenu ici, il me semble nécessaire de signifier que toute conception créationniste du monde du style Jeune Terre, voulant imposer une lecture au pied de la lettre de la création du monde telle qu'elle apparait dans les traductions modernes de la Bible est inacceptable pour tout esprit un peu instruit. Rien qu'une terre n'ayant que 6000 ans d'âge suffit à clore le dossier.
   A l'opposé d'un tel fixisme des choses de notre environnement, Charles Darwin a eu le génie de nous faire comprendre que nous vivons dans un univers en perpétuelle évolution. Toutes nos découvertes scientifiques le confirment en permanence.
Il ne faut pas oublier que Charles Darwin a été extrêmement influencé dans son travail par l'économiste britannique Thomas Robert Malthus ( 1766-1834) (2). Pour schématiser, son idée force est que lorsqu'une population croit, c'est selon une progression exponentielle, les richesses, dont la nourriture, qu'elle peut produire et utiliser ne peuvent croître que de façon arithmétique. Darwin voit dans la lutte pour s'adapter aux ressources de l'environnement le moteur de toute évolution. Nourri sur le HMS Beagle autour du monde au lait de la paléontologie, de la botanique et de la zoologie, c'est une adaptation qu'il décrit comme lente dans son rythme et continue de la lointaine algue bleue des océans jusqu'à ce fameux et bavard homo sapiens. Depuis un ancêtre commun, lutte pour la survie avec élimination des moins bien adaptés. Comment ? Au moyen de transformations aléatoires se transmettant mystérieusement ( Gregor Mendel n'avait pas encore inventé la génétique) (3) aux générations suivantes.
   Quel est le degré actuel de confiance que nous pouvons accorder à cette image ( toute théorie n'est qu'une image de la réalité) qui, depuis l'école, a pris rang dans nos esprits de dogme fondateur de toutes nos sciences ?
   Mettre en question une notion qui a pris force de dogme, c'est prendre le risque d'aller à contre courant, et de se faire marginaliser par les grands prêtres gardiens du temple. C'est aussi faire preuve d'esprit scientifique : nos connaissances n'ont jamais progressé autrement.

restaurer la conscience

   La notion de lenteur et de continuité dans l'évolution darwinienne ne se vérifie pas vraiment. L'étude des fossiles montre qu'il existe des périodes d'hyperactivité comme le cambrien (4), et de grands vides géologiques, comme s'il ne se passait rien. La survie des seules espèces les mieux adaptées à leur environnement a également suscité une objection dès le XIXème siècle à laquelle il n'a jamais été répondu. Les oiseaux sont considérés comme des descendants des amphibiens et des reptiles. Il leur a donc fallu se trouver un jour dotés d'ailes. Avec la lenteur et la progressivité imaginés par Darwin, il a existé des êtres vivants dotés de moitiés d'ailes non seulement ne leur servant à rien, mais les rendant particulièrement vulnérables à leurs prédateurs.
   Les transformations évolutives se seraient, nous dit-on, effectuées de façon purement aléatoire. Fort bien. Le calcul de probabilité que puisse naître ainsi une nouvelle protéine à partir d'une redistribution au hasard de ses 20 acides aminés constituants est impressionnant. Un astronome britannique, Fred Hoyle (5) en donne une image amusante. Le fait que la vie apparaisse par hasard est encore moins probable que celle d'une tornade passant sur une décharge d'ordures soit capable de construire un Boeing 747.
   L'évolution récente, et très rapide en durée géologique, des hominidés, espèces aussi peu douées dans quelque domaine de la vie animale que ce soit, les rendant particulièrement vulnérables pour tous leurs prédateurs, est elle-même troublante pour un médecin.

 

 

 

renforcer la compétence

   Comment enfin pouvoir observer le monde dans lequel nous vivons en termes systémiques s'il n'existe aucun autre système qu'un chaos aux changements aléatoires dans lequel viendraient s'encastrer dans leur hiérarchie naturelle tous les systèmes connus et reconnus par absolument toutes les sciences dans leur domaine propre (6) ?
Une soif de connaissance sans frontière cloisonnante de discipline, il n'y a pas d'autre moteur possible pour sortir de nos incohérences. Toute connaissance est-elle obligatoirement du domaine de la science ? La question n'est pas purement spéculative. Pour une raison simple, c'est que la pensée scientifique dominante depuis Darwin, et bien que celui-ci ait poursuivi des études de théologie, évite comme la peste de soulever l'hypothèse d'un ordre dans la nature, de la possibilité de ce que nos hommes du siècle des Lumières nommaient le Grand Horloger de l'univers. A sa décharge, il faut bien dire que la science a mis tellement de temps à se démarquer des conceptions du monde issues des religions qu'il doit rester une certaine crainte de se faire mettre à nouveau le grappin dessus par des hommes d'église. Big bang, on veut bien aller jusque là. Mais ce qui a bien pu se passer avant, pas question d'en dire quoi que ce soit. Ce n'est plus du domaine de la science, point final.
   Nous, simples humains qui n'avons à défendre ou à condamner aucune institution quelle qu'elle soit, nous avons plus que jamais besoin d'avoir des arguments solidement établis établissant l'existence ou l'inexistence d'un plan d'ensemble expliquant la formation, l'évolution et le fonctionnement de ce monde dans lequel nous vivons, et dont chacun de nous a de plus en plus conscience d'être une infime parcelle. Devant les impasses actuelles de toutes les sciences, et en particulier de notre médecine, comme si elles étaient parvenues presque au bout de leurs potentialités, la réponse traditionnelle repoussée à des lendemains qui chantent ne tient plus.
 Nous ne pouvons plus compter sur les seuls progrès des sciences pour nous apporter une réponse à cette énigme que l'on peut nommer en systèmicien : le système des systèmes.

Notes
(1) Michaut F-M, Impasse systémique sans précédent, LEM 697 http://www.exmed.org/archives11/circu697.html
Sur le père du malthusianisme http://fr.wikipedia.org/wiki/Thomas_Malthus
Sur l'inventeur de la génétique http://fr.wikipedia.org/wiki/Gregor_Mendel
(4) Sur l'explosion cambrienne
http://www.futura-sciences.com/fr/definition/t/geologie-2/d/explosion-cambrienne_5053/
(5)Sur Sir Fred Hoyle
http://lempel.pagesperso-orange.fr/fred_hoyle.htm
(6) Von Berttalanffy L., Théorie générale des systèmes (1968)

 

 

Os court : «Le mental intuitif est un don sacré et le mental rationnel est un serviteur fidèle. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et a oublié le don ».


Albert Einstein

 

Cette lettre illustre notre Charte d'Hippocrate.

Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html


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