Les faux métiers

6 mai 2013
Docteur François-Marie Michaut
lui laisser un message

Se retrouver un jour amputé de son identité professionnelle est un drame absolu pour la personne à qui cela arrive dans notre société. Que le chômage, il faut bien lui donner son nom, concerne plusieurs millions de personnes en France et en Europe ne le rend pas moins lourd à vivre. Les reportages misérabilistes ne disent et ne redisent que cela : partout il n'y a que des victimes qu'il nous faut écouter. Ce qui sous-entend en contrepoint que des bourreaux doivent être démasqués et recevoir la punition qu'ils méritent. Vision simpliste des choses qui ne permet guère d'aller au delà des réactions émotives, aussi justifiées et empathiques puissent-elles être.

Une question, pourtant toute bête, me semble régulièrement laissée de côté par les analystes et les commentateurs. Quelle est la nature du travail de ceux qui ont perdu leur emploi ? Ce n'est pas facile à percevoir pour les non spécialistes. La suppression de postes dans les grandes industries ou dans les sociétés connues de tous frappe beaucoup plus les esprits que la fermeture d'une lointaine pharmacie de campagne trop petite pour survivre.
Depuis toujours, des métiers ont disparu. Sans remonter jusqu'avant Obelix, célèbre livreur de menhirs s'il en est, les sociétés humaines n'ont jamais cessé de faire évoluer leurs façons de travailler en fonction de leur conception du monde et des trouvailles techniques. Les moines médecins du Moyen-Âge, les herboristes, les barbiers-chirurgiens, les religieuses-infirmières, les officiers de santé, les bandagistes, juste pour rester dans le petit domaine de la santé. Tous ont eu leur raison d'être et ils ne sont plus. Qui se souvient encore qu'il y a un demi siècle, dans nos campagnes aux déplacements difficiles, des médecins étaient aussi propharmaciens, c'est à dire qu'ils vendaient drectement aux patients les remèdes qu'ils avaient prescrit ?
Quand ces métiers ont disparu, il n'y a eu aucun vide, d'autres encore inconnus ont surgi et ont prospéré parce qu'ils rendaient des services plus adaptés aux besoins des populations.

Les prophètes futuristes nous annoncent depuis des années l'apparition de nouvelles professions que nous ne pouvons même pas imaginer. Il est évident que toutes les activités liées aux utilisations de l'internet ou de l'électronique en général en sont une illustration. La robotique en chirurgie, les applications des nanotechnologies en médecine sont des secteurs prometteurs. Mais toutes les formes d'aide à la personne, comme dit le langage para-administratif de l'instant, ouvrent également des champs immenses.

Alors, d'un côté, il y a une disparition automatique de métiers qui sont devenus inadaptés à nos besoins actuels. Certains, solidement ancrés dans la tradition, sont en survie artificielle parce que nous n'avons pas encore mesuré clairement qu'ils n'apportent rien à la collectivité humaine.
Ce sont ceux que je nomme, sans me sentir le droit d'en stigmatiser aucun, de faux métiers. Ils sont souvent solidement défendus par ceux qui en vivent.
D'un autre côté, la vie de notre société ne cesse de bouger. Des besoins encore inconnus ou négligés hier se font jour. Des attentes existent, qui sont loin d'être uniquement matérielles, ce qui est difficilement perçu en ces temps de rentabilité immédiate sonnante et trébuchante, où tout s'évalue en euros.
Peut-être serait-il bienvenu, plutôt que de lutter contre (1) le chômage comme nous disons le faire avec les résultats que l'on voit, de faire appel à une compétence encore inexploitée.
Comment la nommer ? Chercheur de vrais métiers.


(1) Le lutter-contre n'est pas toujours sans ambiguité. La lutte contre le tabac s'est transformée sous nos yeux en lutte contre les utilisateurs de tabac. La vieille ligue anti-alcoolique, magnifiquement illustrée par Bourvil, a également été bien marquée par son appelation à double sens.



Retrouver la confiance

 

Restaurer la conscience

 

Renforcer la compétence


Os court : «Le métier de croque-mort n'a aucun avenir. Les clients ne sont pas fidèles. »
Léon-Paul Fargue
Cette lettre illustre notre Charte d'Hippocrate.
Lien : http://www.exmed.org/archives08/circu532.html

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