25 février 2019
Le lecteur peut être surpris de constater que le sujet hautement sensible de l'antisémitisme en France puisse être abordé sur un site s'occupant des questions de santé. L'émotion suscitée par de récents agissements dans l'espace public sous couvert de l'ébullition populaire des gilets jaunes, a fait qualifier la haine des juifs de maladie contagieuse. Le président François Hollande, le 24 février 2015 au cours du diner du CRIF parlait de « lèpre » (1). Quatre ans plus tard malgré quelques remèdes juridiques, bien peu modificateurs des façons de penser, cette pathologie de plus en plus voyante sévit toujours.
Pourquoi et comment peut-on se définir comme un ennemi des juifs qui habitent le même pays et disposent du même statut civique que soi ? Les historiens des religions, les religieux eux-mêmes, les sociologues , les politiques, les psychologues ou les philosophes amènent chacun l'éclairage que permet les limites de leur connaissance spécialisée. Pour reprendre l'image développée ici dans Feuillets de Systémique Médicale (4) nous sommes en plein carottage (2). Chaque discipline de connaissance en forant de plus en plus profond avec ses outils d'investigation cherche à découvrir « la » cause de cette interminable haine. Sans succès ; pas l'ombre d'une relation linéaire de cause à effet en vue. Bien illusoire démarche, hélas, et malgré toutes les bonnes volontés qui en constatent et déplorent les manifestations, de chercher à soigner un mal dont notre intelligence n'a pas su établir l'étiologie.
Pour ne pas céder au désespoir d'un tel état d'impuissance, il est, me semble-t-il, acceptable d'essayer, tant pis si elle se révèle peu classique, une compréhension non plus linéaire mais systémique. Si elle se montre peu crédible, ce qui est possible, chacun peut la rejeter. Si elle peut ouvrir une piste intéressante, d'autres esprits plus perspicaces sauront bien s'en emparer pour en tirer le meilleur parti. La recherche, quelque soit le domaine, agit ainsi. L'ignorance a toujours le même discours binaire : moi je sais, ou moi je ne veux pas le savoir.
Qu'est ce que c'est que cette histoire de système, que vient-elle faire dans l'héritage des fils d'Abraham (3) que nous sommes presque tous en France, croyants comme non religieux ? Oui, je sais, parler de religion dans un écrit qui se dit inspiré par les questions médicales peut surprendre ou choquer la laïcité de certains. Ce n'est pas cependant une raison suffisante pour mériter le pilori ou l'autodafé sous nos cieux.
Les porteurs de la tradition juive se nomment eux mêmes le peuple élu. Par qui ? Par le principe créateur ( son nom même ne peut pas être prononcé selon la tradition) dont l'action est décrite par la Genèse. Description de quelque chose de non matériel ( le Verbe, le Logos disent les Chrétiens), un incroyable concentré d'énergie pure traduisent les physiciens, qui soudain se transforme en matière (4). La parole, celle dont l'humain est largement doté grâce à son cerveau et à son développement culturel. unique dans les espèces vivantes. Cette élection, à quel pouvoir - qui n'est pas donné à toute l'humanité - peut-elle bien conduire ? Si nous voulons interroger la tradition juive, sans nous prendre les pieds dans des façons de dire spécifiques aux discours religieux au fil du temps, nous tombons sur l'histoire d'une énigmatique révélation. Les lecteurs habituels reconnaitront là ce que je nomme la technique de chalutage (2). Les mailles de notre filet tiré par le chalutier de notre curiosité ont remonté une prise intéressante. Tellement intéressante, même, qu'il a fallu pendant des millénaires, tant elle pouvait se révéler explosive pour ses porteurs, la garder secrète. Y voir quelque complot pour prendre ou garder un pouvoir est une erreur, comprendre que ce fut une technique pour ne pas se faire tuer par les puissances dominantes est plus proche de la vérité.
La connaissance scientifique, y compris en médecine (5) nous a démontré la nécessité de sortir du petit cercle des initiés.
Depuis le siècle dernier bien des esprits se sont ouverts dans tous les domaines de la connaissance et ont compris la nécessité d'essayer de communiquer entre eux. À la recherche d'un principe systémique commun souvent espéré, théoriquement indispensable mais demeurant incompréhensiblement insaisissable. La transdisciplinarité, comme la pluridisciplinarité, ne sont parvenues à aucun éclaircissement. C'est peut-être l'humoriste Pierre Dac qui a résumé le mieux cette situation : « Tout est dans Tout, et réciproquement ». Finalement un seul type de système devenant lui-même un élément constituant indispensable à un autre cycle lui-même constitutif d'un autre plus vaste de l'infiniment petit au plus grand possible. La biologie nous parlant de l'ADN ou du cycle du carbone le dit sans ambiguité. La cosmologie ne dit rien d'autre.
Alors, quid de cette révélation confiée sous le sceau du secret à quelques êtres rares de ces tribus nomades du Proche-Orient évadées d'Egypte ? Une réponse positive et bouleversante à la question que j'ai posée dans le titre du Coup d'Oeil de ce site Exmed il y a juste deux jours : Et si Homo Sapiens était encore inachevé ? Oui, nous ne sommes pas finis, nous sommes encore en chantier de construction. Pour survivre à court terme, sans aucun catastrophisme, nous n'avons pas le choix. Nous atteler à collaborer sans réserve au perfectionnement terminal de notre propre création personnelle encore inachevée. Passer au peigne fin tout ce que nous ont livrées les sciences comme les grands traditions du monde qui, une fois décantées de leur gangue symbolique, disent la même chose. La plus bavarde et la plus élaborée est celle cultivée par la judéïté. Impossible de la passer à la trappe en 2019 pour qui ne se sent pas suicidaire.
Comment mieux terminer cette trop brève incursion dans un domaine, je le confesse, qui m'était totalement étranger il y a quelques années encore, sans céder la parole à Primo Levi (6) : « L'antisémitisme est un phénomène typique d'intolérance ». Allergie à des gens qui disent sans dire tout en disant l'essentiel que ne connaissent pas encore « les nations »(7).
Os Court :
« Des jeunes gens antisémites, ça existe donc, cela ? Il y'a donc des cerveaux neufs, des âmes neuves, que cet imbécile poison a déjà déséquilibrés ? Quelle tristesse, quelle inquiétude, pour le vingtième siècle qui va s'ouvrir ! »
Emile Zola (1840-1902) Lettre à la jeunesse 1897
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