Qu'elle soit feuille morte à sa branche arrachée,
Ou juste bourgeonnante à son arbre accrochée,
La feuille est toujours là qui marque encor nos vies,
Autant qu'elle a compté pour toutes les ethnies.
A la feuille de vigne, on fut fier d'ajouter,
La feuille des impôts et ses complexités.
Les habits des pygmées n'étaient que d'une feuille,
Et tous nos mille-feuilles ont été trompe-l'œil.
Les feuilles de nos arbres ont bien des différences,
Mais feuilles restent feuilles et chacune a son sens.
Les feuilles de laurier ont fait tourner cent têtes,
Comme les feuilles d'or sur bien des épaulettes …
Si des feuilles de chou racontent des sornettes,
Quelques feuilles de soin parfois ne sont pas nettes :
Des feuilles ont bien en marge un air de forfaiture.
Ce n'est qu'en bas de feuille où est la signature …
Si la feuille de l'arbre est sa physionomie,
Cernant son caractère et son mode de vie,
Comme chez les humains, qu'ils soient laids ou bien beaux
Elle expose à tous vents qualités et défauts.
Certaines sont joviales, épanouies, bienheureuses,
Dynamiques et rapides, actives et nerveuses,
Quand d'autres sont hautaines, ou même pontifiantes
Figées ou ralenties et parfois arrogantes.
Qui a trop peur des feuilles évite la forêt,
Mais tremble comme feuille à ne voir que des prés.
Les pensées sont des feuilles où les mots sont des fruits,
Mais les feuilles à journaux, l'œil souvent les détruit.
Les portefeuilles emplis n'attirent pas la chance :
Les trèfles à quatre feuilles n'ont pas de connivence ;
Durs de la feuille on reste, aux appels sans-le-sou.
Je hais le trop verni de la feuille de houx.
La vie est artichaut qu'on mange feuille à feuille
Assis sur un brûlot plutôt qu'en un fauteuil.
Mais les rêves et la vie sont feuilles du même arbre :
Arbre à feuilles caduques où plus rien n'est de marbre …
La racine et la feuille ont les mêmes parents ;
La feuille détachée va où lui dit le vent.
On laisse choir les ans comme arbres avec les feuilles ;
Feuille de faire-part n'atténue pas le deuil … |