Ce texte a été inspiré par une série d’échanges sur la liste Exmed-1.
Il répond à deux questions sur la fonction des infirmières, et sur les caractéristiques des médecins en formation.
Si on veut comprendre l'évolution du monde infirmier, il faut là encore regarder la formation des infirmières. Elle a évoluée sans véritable adaptation à l'exercice de la profession, avec un programme calqué sur le modèle médical, y compris avec la création récente d'un conseil de l'ordre ! Et cela en allant de plus en plus vers une indépendance vis à vis du médecin.
Depuis de nombreuses années la carrière d'une infirmière hospitalière est totalement indépendante des médecins et du chef de service. Celui ci ne peut pas choisir sa surveillante chef et les infirmières lui sont le plus souvent imposées par la Direction. La notion d'équipe soignante a été ainsi dans beaucoup de services détruite et les 35 heures feront le reste. Actuellement chacun à son autonomie et ses charges respectives , sauf les médecins dont les obligations sont sans limites (et oui ! ) .La traditionnelle visite du médecin ne se fait plus avec l'infirmière depuis longtemps dans de très nombreux services, celle ci dans son bureau s'occupe de son dossier médical , des formalités administratives, bons,médicaments,etc.
L'autorité médicale a donc été progressivement réduite strictement au domaine médical , au bénéfice d'autres corporations et surtout de l'Administration hospitalière. Ce partage du pouvoir est il bénéfique aux patients, aux infirmières aux médecins ? La réponse est non, même si cela a manifestement apporté un peu d'air dans le monde hospitalier, qui reste cependant rigide et maintenant cloisonné.
La faute à qui ? Aux médecins eux mêmes, qui trop occupés à soigner, à chercher (du personnels, des moyens, etc ) n'ont pas été suffisamment organisés pour se défendre, à leur individualisme, leur corporatisme.
Aujourd'hui , on ne reviendra pas en arrière et il faut s'adapter, refaire des équipes mais avec qui et comment ?
La nouvelle Gouvernance de droit ? Les Pôles d'excellences ? Des mots qui cachent souvent la médiocrité et la pauvreté de nos moyens, et comment faire ? En acceptant de se remettre en question, en regroupant les équipes, les moyens financiers et humains, en partageant la direction (medicoadministrative) etc. Là est le véritable challenge : disparaître pour renaître. Renaître après avoir analysé les points forts, les points faibles et l' environnement . En bref le Marché de la santé, et oui le mot est lâché !
Ceci me permet de faire la transition avec ma seconde réflexion sur les jeunes médecins et l'argent.
Pour avoir suivi 35 promotions de futurs puis de jeunes médecins, il ne m'a jamais semblé que la grande majorité d'entre eux était motivée par l'argent. Aujourd'hui la majorité souhaiterait, nous dit-on, faire une carrière salariée !
-Le principal critère de choix aujourd'hui c'est la place du candidat à la sortie de l'examen final et à sa possibilité de passer ou non une spécialité (même si la Médecine Générale est considérée comme une spécialité!). Ensuite l'orientation va dépendre des possibilités de choix des services (vécu du stage, tutorat, exemplarité restent des valeurs éternelles d'orientation)
-Un point qui a pris beaucoup d'importance depuis dix ans, c'est le choix de spécialités ''tranquilles ''. C’est à dire sans risques medicolégaux, sans gardes. Ainsi la chirurgie générale, l'obstétrique, la psychiatrie sont désertées. La dermatologie est très valorisée (d'autant que l'Oréal est là pour nous le rappeler tous les jours ).
-Bien entendu les spécialités les plus lucratives (en production d’actes ) restent très demandées (ophtalmologie). Mais là, la clientèle est exponentielle et le handicap souvent lourd.
-Enfin certaines spécialités nécessitent un très gros investissement financier - Scanner, IRM, endoscopies chirurgie - qui ne peut se faire dans le privé que par une répartition des frais (vacations radiologiques) et une multiplications des actes. Remplacement des matériels, concurrence ville hôpital, le médecin est dans une spirale où il ne peut plus grand chose pour respecter son serment , du fait notamment de l’inflation des coûts de son activité.
Une fois installé le médecin (en particulier le généraliste) est soumis à de nombreuses charges , qu'il découvre alors souvent totalement, et à la difficulté à se faire une clientèle . On ne dit pas que beaucoup de médecins ont de faibles revenus (30% ne dépassent pas le SMIC) . Une dérive de plus en plus fréquente de jeunes médecins pour se différencier est d'offrir une médecine parallèle (en plus de leur activité traditionnelle ou en exclusivité) non remboursée , et on validée par la science.
La limite entre bêtise et escroquerie est ici difficile à différencier et l'éthique de ces pratiques demeure très floue (sauf pour quelques patients en fin de vie).
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