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Le bonheur est à portée de main ! C‘est du moins ce que nous promettent les nouveaux docteurs en psychologie positiviste qui s’occupent de la quête scientifique du bonheur. Jusqu’à présent, la psychiatrie, la psychologie s’étaient intéressées aux troubles psychiques et à leur cortège d’émotions négatives. La psychologie positiviste va à l’encontre des approches traditionnelles du soin psychique qui cherchent d’abord à soulager la souffrance psychique. Mais que ne ferait-on pas pour être heureux, on en salive d’avance à l’instar des chiens de Pavlov!
Que se cache-t-il derrière ce courant qui remporte un franc succès dans les pays anglo-saxons? Il y aurait plus de 30 000 coachs de vie aux États Unis, et de plus en plus d’écoles font venir des positivistes pour que les élèves soient éduqués aux rudiments de l’art du bonheur.
Le mot bonheur est un terme vague étranger à la conception de l’évidence based medecine. Il serait déjà plus acceptable de dichotomiser les états mentaux en émotions négatives et en émotions positives.
Pour les positivistes, le bonheur est un paramètre fictif désignant une pléiade d’émotions positives, en somme plusieurs types de bonheur.
L’optimisme, la gratitude, la pleine conscience, l’espoir, la spiritualité, l’allégresse, le pardon et d’autres vertus émotionnelles entraînent des états physiologiques mesurables par IRM et EEG. Spécialisé en "biologie de la joie", Richard Davidson a étudié ce qui se passe dans le cerveau heureux, le lien entre l’activité du lobe préfrontal et l’état de béatitude. Le bonheur se localiserait principalement dans le cortex préfrontal gauche.
Quel est le soignant qui n’a pas constaté au cours de sa pratique (chez leur malades ou pour eux ) que l’espoir, l’optimisme associés à une attitude positive sont les clefs de la santé. Diverses études ont montré l’impact du bonheur sur la santé. Les optimistes développeraient 50% d’anticorps supplémentaires par à rapport aux pessimistes. Une étude néerlandaise publiée en 2004 sur des seniors montraient que les optimistes ont deux fois moins de chance de mourir prématurément que les autres. Le taux de maladies coronariennes chez les optimistes est moitié moins élevé que dans le reste de la population alors que l’envers du bonheur, la dépression, aggrave les troubles cardiaques. D’autres émotions positives telles que l’espoir, l’esprit de curiosité protégeraient de l’hypertension, du diabète et des infections respiratoires.
Y a-t-il des recettes pour être heureux? Qu’à cela ne tienne, nos bons psychologues positivistes proposent des devoirs expérentiels ( des thérapies) qui reconfigurent les mauvaises attitudes, une sorte de “mental building” destiné à booster votre cerveau pour le rééduquer à éprouver des émotions positives.
Kahdan, l’un des pontes de la psychologie positiviste, suggère de méditer 1/4 d’heure par jour au moins trois jours d’affilée et de s’adonner au yoga. Le Mindfulnness inspiré de la méditation bouddhiste tibétaine où le soignant est appelé instructeur est un autre exemple de ces devoirs expérentiels où l'on développe la pleine conscience.
Outre Atlantique, le principal reproche fait à la psychologie positiviste est qu’elle se donne des airs de religion, et qu’il y aurait des dérives sectaires. Les sophismes sont nombreux. Toute épreuve du fatum comme une maladie à l’instar d’un cancer par exemple doit se transformer en occasion de développement personnel. Julie Nrem, directrice du département de psychologie au Wellesly College dans le Massachussets pense que « cette discipline ne se soucie guère des différences individuelles ». Entre autres, la notion de résilience développée par Boris Cyrulnik, auteur d’un “Merveilleux Malheur” semble ignorée des positivistes.
Les émotions négatives ne sont pas toujours nuisibles. Elles sont aussi des symptômes qui éclairent le praticien dans le choix du traitement. La recherche de l’homéostasie entre émotions négatives et émotions positives semble absente chez les positivistes. La recherche du bonheur via la psychologie positiviste ne serait-elle pas une dictature de l'esprit ? Freud s’était interrogé sur la grande illusion du sentiment océanique, ce sentiment de béatitude quasi permanent. On a parfois besoin d’une dose de mal être pour sortir d’une mauvaise passe, pour simplement réfléchir ou demander de l’aide à un professionnel de la santé si les souffrances sont insupportables.
Les sceptiques remettent en question les notions scientifiques de la psychologie positiviste, et la validité des études souvent douteuses. Daniel Todd, professeur de psychologie de Harvard n’y va pas par quatre chemins en formulant ce vœu: « Si j’avais une baguette magique, il n’y aurait pas de psychologie positive, il n’y aurait que des psychologues positifs ».
Courant à la mode, la psychologie positiviste n’est pas une découverte. En leur temps, A. Maslow et Carl Rogers ont été les pionniers du courant humaniste qui tenait compte du sens de la vie. La psychologie positiviste semble confondre bonheur et un supposé bien être qui pourrait se traduire par l’atténuation ou la disparition des émotions négatives. La psychanalyse, elle, ne promettait que de transformer la grande souffrance en souffrance ordinaire, et c’est déjà pas mal !
A défaut de promettre la félicité éternelle, dans son livre “Faites vous même votre propre malheur”, Paul Watzlawick en avance sur la psychologie positiviste s’était livré à une parodie des livres de conseils pratique. L’humour nécessaire en ces époques troublées est un pur bonheur!
Pour en savoir plus: Courrier International, supplément août 2007
Philosophie Magazine, Novembre 2007
Site: Pour ne pas se laisser piéger par les sectes (PREVENT SECTES) http://www.prevensectes.com
( NDLR : site partenaire de notre ami et compagnon d’Exmed Mathieu Cossu )
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