SYLVETTE,
(chuchotant plus que parlant vraiment, au début).
Tu as fini, là ? Tu as surtout fini de te faire mal, de
te torturer, de NOUS malmener ? Ecoute, chéri, je ne pouvais
pas une seule seconde imaginer que cela allait être facile,
certainement pas, je ne suis pas dans ta peau, mais je... je la
partage, je ne suis pas dans ta tête, mais je l'entends
et je lui parle, et toi, tu es... tu es partout et sans arrêt
EN moi, avec moi, alors bien évidemment je sais combien
cela peut être sans doute... effroyable, impossible à
concevoir, à admettre sans révolte, et je comprends
même parfaitement que tu aies besoin d'être blessant,
un peu sordide, violent vis à vis de moi, de nous, je suppose
qu'il est automatique d'avoir envie de mordre, de taper sur les
autres... j'ai lu partout que les gens atteints par des maladies
graves en veulent forcément aux bien portants, cela me
semble même naturel, inévitable, mais après
cette révolte, cette fureur, après l'abattement,
je te fais confiance, mon chéri, tu vas aller te faire
opérer, pour être sorti d'affaire, pour toi, pour
nous...
JEAN-CHRISTOPHE. Tu veux que je devienne impuissant,
c'est ça ? C'est ça que tu appelles guérir
?
SYLVETTE. Non, je veux tout simplement, impérativement,
d'abord, que tu VIVES
JEAN-CHRISTOPHE. Mais justement, ce ne sera plus
VIVRE ! Comment peux-tu évoquer encore l'idée de
VIVRE ?
SYLVETTE. Pourquoi ? Ce sera vivre ENSEMBLE, tous
les deux, ce sera vivre pour nous, pour les autres, continuer
à bâtir des projets, prévoir un avenir, construire
des perspectives...
JEAN-CHRISTOPHE. Tu parles ! Moi je ne serai plus
que la moitié de moi-même, la moitié d'un
homme
SYLVETTE. Ecoute mon chéri, si un jour tu
perdais un bras, on est obligé de te le couper, tu crois
que tu me perdrais aussi, que tu deviendrais une moitié
de mari ?
JEAN-CHRISTOPHE. Cela n'a rien à voir
SYLVETTE. Tu le vois, tu le ressens différement,
mon amour, mais je serais parfaitement capable de te... de te
faire manger jusqu'à ce que tu y arrives seul, de t'apprendre
s'il le fallait à écrire de l'autre main, de te
JEAN-CHRISTOPHE, (presque violent, se levant brutalement).
Je te dis que ça n'a RIEN à voir
! Là c'est moi qui ne serai plus capable... je ne vaudrai
plus rien, je ne pourrai plus... t'aimer, te rendre heureuse
Il
termine dans un sanglot qu'il tente de réprimer
SYLVETTE,
(elle le prend par la main, l'amène à se rasseoir,
puis elle lui caresse la tête, comme à un enfant
que l'on berce) . Tu entends tes propres paroles, mon
amour ? Est-ce que parce qu'on ne peut plus faire l'amour cela
veut dire que l'on n' aime plus ? Tu sais, 40% des hommes de ton
âge, sans cancer de prostate, mais parce qu'ils fument,
ils boivent, ils vieillissent tout simplement, leurs artères
se bouchent, ils ont des soucis, des problèmes de tous
ordres, ont tout banalement des difficultés sexuelles,
des pannes, ou une impuissance permanente, alors ça voudrait
dire que tous ces types là n'aiment plus leur femme, ou
comme tu dis ne peuvent plus la rendre heureuse ?
Jean-Christophe
ne répond rien, tous deux gardent le silence un bon moment,
Sylvette caresse toujours son mari, elle le cajole, lui malaxe
la main. Après un long moment, elle reprend ses propos
sur un ton neutre, ému mais persuasif
Non,
ils ne peuvent plus la pénétrer, c'est sûr
et c'est tout, bon eh bien eux ils ont perdu le plaisir de donner
cela, et elles, leurs femmes, leurs compagnes, leurs partenaires,
celui de recevoir cette part-là, mais ils s'aiment, tu
comprends, ils s'aiment bon dieu ! ! Excuse-moi... Mais la tendresse,
le sourire, la parole, les échanges, le bonheur d'être
ensemble, les projets, ce qu'ils construisent, qu'ils réalisent,
leur chemin parcouru, tout ce qu'ils ont construit, leurs enfants...
Ils s'aiment, bon sang, ils s'aiment ! Et les caresses, et se
frotter, se toucher, se regarder, lire les yeux de l'autre, deviner
ses pensées, sentir son odeur, se blottir, se cajoler,
tu en fais quoi de tout cela, mais on s'aime merde, on s'aime
non ? Pardon, je m'emporte, mais je ne peux pas t'entendre balayer
tout pour une histoire de... de sperme quoi !
Silence
encore prolongé, Jean-Christophe accepte les câlins,
Sylvette l'embrasse, ils finissent par parvenir à échanger
un vrai baiser maladroit d'abord, puis un bouche à bouche
tendre, profond, réussi, appuyé
JEAN-CHRISTOPHE.
Mais toi, tu... mais tu...
SYLVETTE. Mais moi, chéri, mon amour, moi
je veux aimer un type VIVANT, tu comprends, pas un mort qui aura
réussi à éjaculer un peu jusqu'au bout, quitte
à en saigner ou à en souffrir, avec obstination,
et ensuite pas un mort dont je regarderai les photos en pleurant
(elle a du mal à poursuivre, sa voix devient incertaine)
Moi, mon amour, je te veux jusqu'à notre fin, je veux vivre
pour toi, pour nous, t'attendre, t'espérer, te garder,
tu entends cela, te garder ? Et au lieu de nous dire qu'on s'aime
avec nos corps, nos sexes, on se le dira à coup de tripes,
avec la langue, les paroles, à coup de sentiments, avec
le coeur, les yeux, l'âme, à coup de caresses et
en se serrant très fort comme des noyés, mais avec
des mots de besoin, de bonheur, d'avenir, à coup de tendresse
avec des attentions, et des espérances, et des partages,
et des échanges... (elle finit par laisser se briser
sa voix sur un sanglot sec, une sorte de hoquet)
JEAN-CHRISTOPHE, (au bout d'un long moment, secoué,
ému à un point inimaginable, mais qu'il ne sait
pas traduire, faute d'habitude, il la regarde, admiratif et étonné,
bouleversé et incrédule, et il ébauche un
sourire timide, mais qui se précise peu à peu).
Tu sais... Tu sais que tu es une femme extraordinaire ?
SYLVETTE, (elle sourit aussi, très émue
également, et le regarde crânement). OUI
! !
JEAN-CHRISTOPHE. Mais je ne peux pas m'empêcher,
ce n'est pas de ma faute, je suis fabriqué comme cela,
je ne peux pas oublier que je ne serai plus capable de rien t'offrir,
de te combler, de te
SYLVETTE, (elle l'interrompt un peu sèchement
). Tu veux que je te dise, MOI JE, MOI JE, (elle se
laisse aller à rire) tu attends que je te dise quoi
? Ne t'inquiète pas, mon homme, je me débrouillerai
parfaitement toute seule avec mes petits doigts habiles (là,
elle pouffe carrément) et puis je te montrerai que
tes mains à toi aussi, et tes petits doigts malhabiles
ils peuvent aussi servir à quelque chose, des fois...
elle
regarde son mari en coin, il sourit sans rien dire, et elle reprend
Mais
tu sais quoi ? Tu auras à faire, comme on dit, le deuil
de ton fonctionnement, ça c'est pour toi, pour moi RIEN
ne change, mon amour, (elle se met à lui parler avec
une extrême douceur tendre, en le regardant par en dessous)
rien ne change, Chris, tu restes le même type, celui que
j'ai choisi, que j'aime pour des dizaines de raisons, un bonhomme
dont j'ai besoin pour me protéger, m'aider, m'aimer, indispensable
terriblement et tout le temps, et tu ne sais pas le pire ? c'est
qu'on va trouver moyen ensemble d'être heureux comme jamais
comme cela, parce qu'on sera vivants, tous les deux. Personne
ne peut le savoir, mon chéri, ça ne sera écrit
nulle part sur ton visage, et je suis sûre que tu croises
tous les jours 10 hommes à ton boulot, dans la rue, à
ta cantine, partout, des mecs qui ne peuvent plus avoir de rapports,
sans que tu le devines, ça ne se lit pas dans leurs yeux,
et même, quand ils rencontrent ta secrétaire eux
aussi ils en ont envie, dans la tête. Et tous ces types
là, tes collègues, ton patron, va savoir, ton garagiste,
ton comptable, est-ce que je sais, les gens que tu vois dans le
train, eh bien au lieu de se servir de leur engin tout doux, tout
dur, tout beau, tout fier, ils ont une langue, des mains, ils
les utilisent, et puis ils forcent sur leurs yeux, leur coeur,
leur voix, ils augmentent la tendresse, ils chargent les mots,
ils aggravent leur sourire, ils profitent de cette peau si extraordinairement
lisse et tendre sous les poignets, sur leurs paupières
qui plissent quand ils s'attendrissent, et cette timidité
pour oser dire des mots un peu... oubliés, oh des expressions
comme « je t'aime », tu vois? ou « j'ai besoin
de toi » ou même des trucs un peu ridicules, ou désuets,
du genre « merci d'être là », tu comprends
ce que je veux dire?
Ils
se rapprochent, et plongent dans les bras l'un de l'autre, restant
enlacés longtemps
JEAN-CHRISTOPHE,
(avec l'air de celui qui doit produire un gros effort pour prononcer
de tels mots). Oui, c'est vrai, je dois l'admettre,
merci d'être là, ma chérie... . Je ne sais
pas comment vous, les femmes vous savez toujours tout : ce qu'il
faut dire, la manière de l'exprimer, le moment exact où
c'est utile... . Remarque cela ne signifie quand même pas
que tu saches exactement ce que tout cela peut représenter
pour un homme...
SYLVETTE. Non, c'est vrai, tu as forcément
raison. Mais j'en profite pour te rappeler des faits. Quand ma
soeur a dû être opérée de « la
totale » comme on appelle cela, autrement dit quand on lui
a tout enlevé il y a trois ans, j'avais quelqu'un à
côté de moi, tu t'en souviens sans doute un peu,
malgré tes problèmes actuels, parce qu'il s'agissait
de toi, qui me répétait toutes les fois que j'appelais
Geneviève, qu'elle avait un moral catastrophique : «
mais enfin c'est tout de même terrible, elle ne se rend
pas compte que c'est pour guérir ? Si on l'opère
c'est pour que son machin s'arrête, que la tumeur ne progresse
pas, non ? » Tu te rappelles tout ce que tu disais ? Et
tu ajoutais, tranquille, lucide et brutal : « de toute façon
elle ne comptait plus avoir d'enfants ? Alors qu'est-ce que cela
changera qu'elle ait encore des organes ou non ? »
Jean-Christophe
baisse la tête sans répondre
Alors
tu vois, ce n'est surtout pas pour t'accuser de quoi que ce soit,
non, tu raisonnais, sainement d'ailleurs, en homme carré,
à l'écart du problème, pas véritablement
concerné. Et à moi, quand elle m'appelait, quand
je l'écoutais pendant des heures, Geneviève me répétait
exactement tes mots de tout à l'heure: « je ne suis
plus une femme, j'ai tout perdu, ils m'ont amputée, je
ne vaux plus rien » Alors c'était juste pour te dire
que je crois pouvoir TOUT comprendre, tout entendre
JEAN-CHRISTOPHE. Tu m'aideras?
SYLVETTE. Est-ce que je n'ai pas déjà
commencé, depuis un moment?
JEAN-CHRISTOPHE. Et les autres, on va leur dire
quoi?
SYLVETTE. Ecoute, comme je te l'ai expliqué,
il n'y a pas écrit sur ton front « j'ai un cancer
de la prostate». Pour des tas, une majorité de gens,
cela ne les regarde en rien, alors je pense que tu auras intérêt
à développer une logique que j'appellerais de «
bénéfice secondaire » ou bien de « redevance
d'information », et c'est tout. Cela dép
JEAN-CHRISTOPHE. Tu peux m'expliquer?
SYLVETTE, (souriante, et avec un geste apaisant de la
main). Je m'y apprêtais, j'y arrive. Tu vois,
regarde par exemple les Reverdin, ce soir, tu t'interroges d'abord:
« quel est l'intérêt réciproque, le
bénéfice des parties en cause ? » L'amitié,
l'estime, pour ma part je n'apprécierais pas, si quelque
chose de grave arrivait à Marielle, qu'elle ne m'informe
pas. Et puis cela permet la clarté, cela écarte
ensuite des excuses compliquées à trouver, des explications
vaseuses. Pour des gens comme eux, on avise selon les circonstances,
et on leur expliquera dans un moment favorable. Pour ton boulot,
autre exemple, forcément il faudra de temps en temps des
justificatifs à des absences répétées,
une forme pas terrible au début. Dans ce cas, c'est TON
intérêt qui devient prioritaire. Donc tu prendras
rendez-vous avec le médecin du travail, il est tenu au
secret mais pourra te couvrir, et puis ton chef, ton ou tes supérieurs
hiérarchiques directs, c'est tout. Les autres, ce sera,
au pire « j'ai quelques soucis de santé, mais ne
t'en fais pas je me soigne »
JEAN-CHRISTOPHE. Je pensais surtout à la
famille
SYLVETTE. A mon avis, forcément information,
mais on la modulera selon les individus, leur psychisme. Mais
je trouve qu'il n'y a rien de pire que de fonctionner dans l'hypocrisie
glauque, avec les autres qui croient te protéger dans la
conspiration du silence, du coup toi qui serais obligé
de faire semblant de croire que tout va pour le mieux, juste un
contrôle de routine, pensez-vous, après cela certains
passeront leur temps à te demander si tu manges bien, au
moins, si tu n'as pas maigri, d'autres à t'appeler toutes
les semaines alors qu'ils t'ignoraient depuis des années,
les vieilles à t'affirmer que tu as vraiment bonne mine...
Non, moi je serais pour l'information lucide, objective, le réel.
Au moins tu es victime d'un cancer qui guérit, alors pas
de messes basses et de conciliabules. Ceux qui voudront éviter
le sujet, ils parleront de foot, de vacances, de boulot ou de
chômage, les autres on leur donnera les vraies réponses,
les perspectives, la surveillance, et puis voilà...
JEAN-CHRISTOPHE. On a l'impression que tu as pensé
à tout, dans les moindres détails
SYLVETTE, (elle prend un temps prolongé pour
réfléchir). Tu sais, c'est pour ce chapitre
là Bergame, oui notre petit généraliste gentil,
qui m'a le plus éclairé. Sous ses dehors un peu
froids au départ, c'est un type incroyablement humain,
tu sais, tu devrais aller parler avec lui bien plus souvent. Attends,
j'essaie de retrouver ses expressions. Oui, il m'a dit «
tout est une question de nuances entre vivre et exister. Quand
on apprend une nouvelle comme celle là, concernant votre
mari, au départ on se réfugie dans la VIE. Le corps,
les opérations, la survie, la guérison, les traitements.
Mais très vite il va falloir l'aider à repasser
dans l' EXISTENCE. Comment évoluer tous les deux, vous
aimer, oui oui, il a exactement employé ces mots là,
nous aimer, comment se situer en tant que malade parmi des bien
portants, ou supposés tels, car il doit y en avoir des
tas d'autres dont vous ignorez la situation réelle, dans
un travail, avec des obligations, dans un système familial,
social, professionnel, associatif, que sais-je...» voilà
de quelle manière il a éclairé cette affaire.
Et je dois dire que cela m'a considérablement aidée
à raisonner. Tu vois, autour de nous, tu vas, nous allons
être entourés de personnes pour lesquelles seule
la vie compte, les vieilles qui craignent tous les jours de mourir,
qui se hâtent de vivre chaque minute dans l'urgence, ta
mère et la mienne, et puis des tonnes de femmes et d'hommes
encombrés de soucis matériels, d'argent, de travail,
de survie, occupés par les guerres, les menaces. Tu vois
ce que je veux dire, il y a tellement de gens, ils ont la chance
incroyable de ne pas vivre dans la guerre, ils ne sont même
pas chômeurs, pas malades, n'ont pas de soucis financiers,
mais il va falloir qu'ils se préoccupent d'environnement,
de bio, d'écologie, de ce qu'ils mangent, de la pollution,
du nucléaire, des virus, de la contagion. Tous ceux là,
ils resteront dans la VIE jusqu'à ce qu'ils en meurent,
si tu comprends ce que je veux dire ? Et il s'en trouvera d'autres,
intéressés eux par l'existence, comment être,
se comporter, entrer en relation, apprendre, s'intéresser,
donner, se situer dans le monde, écouter et entendre, se
cultiver, découvrir, utiliser sa curiosité, ses
envies de découvrir. Eh bien ce que je souhaiterais c'est
qu'on parvienne, malgré ce qui t'arrive, à demeurer
dans l'existence, pas seulement dans la vie, dans l'être,
sentir, penser, l'émotion, et pas seulement dans l'avoir,
l'agir...
JEAN-CHRISTOPHE. Je ne te savais pas aussi philosophe
SYLVETTE. Que sait-on de l'autre, même le
plus proche ? Tout à l'heure, tu ignorais même que
je te préfère vivant et existant auprès de
moi, avec moi, que n'importe quoi d'autre.
Ils
restent silencieux longtemps, se serrant les mains
Mais
tu sais un truc aussi ? C'est que la philosophe elle ferait bien
de mettre ses mains dans ses saladiers et ses poêles, parce
que les deux autres, là, tout à l'heure, c'est à
dire même très bientôt, ils ne vont pas se
contenter de discours
JEAN-CHRISTOPHE. Tu veux que je t'aide ?
SYLVETTE. Tiens donc, tu sais aider, toi ? (elle
sourit) Oui mon chéri, comme tu veux, si tu préfères
ne pas me lâcher, sauf les mains parce que j'en ai besoin,
viens avec moi. Mais va peut-être ranger tes affaires d'abord,
non ?
JEAN-CHRISTOPHE. Oui Maman ! !
Elle
se dirige vers sa cuisine, tandis que lui se hâte vers la
salle de séjour, il attrape son imperméable, va
le ranger, elle se saisit de ses ingrédients et préparations,
et remet en route son dîner du soir.
Dans la cuisine, peut-être seulement pour faire du bruit,
se donner un complément et un répit à leur
conversation, Sylvette branche la radio, et on entend une série
de flashes d'actualité qui égrène les malheurs,
les vicissitudes, les conflits, les ruptures et les ratés
de la société...
«
dans l'actualité de ce jour, d'abord cette explosion dans
un dépôt de matières inflammables en grande
banlieue, les enquêteurs penchent pour une hypothèse
criminelle... la synagogue de la périphérie lyonnaise
qui a brûlé avant-hier a bien été la
cible d'un acte de malveillance, d'après les services de
Police, une surveillance accrue va être mise en place...
Bison Fûté prévoit des centaines de kilomètres
de bouchons pour le prochain départ en week-end, soyez
prudents l'an dernier on avait dénombré 179 morts
sur la route à cette occasion... au Proche-Orient un attentat
suicide a provoqué le décès de 11 victimes,
en sus du khamikase, en l'occurrence une jeune femme de 19 ans...
. Les deux malfaiteurs qui avaient été interceptés
après une traque mouvementée à la suite du
braquage d'une agence bancaire en région parisienne sont
parvenus semble-t-il, on l'apprend à l'instant, à
s'échapper du commissariat où ils étaient
entendus en sautant par la fenêtre au moment où on
allait leur chercher des sandwiches, les complices qui les attendaient
dans la rue voisine à bord d'une voiture volée les
ont emmenés aussitôt vers une destination inconnue
à cette heure des brigades de recherche... et à
propos de recherche, un chercheur néo-zélandais
évoque la possibilité d'un moustique transgénique
qui résisterait au paludisme... . Toujours dans le domaine
de la santé le dépistage de certains cancers serait
grandement facilité par l'introduction de substances se
fixant de manière élective sur les cellules atteintes...
. Enfin en sport, la blessure du meneur de jeu du Real Madrid
n'est finalement pas aussi importante que prévu, il devrait
rejouer d'ici deux semaines, on annonce toujours à son
propos que la dernière campagne publicitaire dont il a
été le support pour le compte d'une boisson pétillante
bien connue lui aura procuré un revenu de 3 millions d'euros,
de quoi se consoler... . C'est la fin de ce bulletin, le temps
demain, maussade, venté et agité sur le nord, plus
serein au sud »
Sylvette
interrompt l'émission de radio un peu rageusement. Elle
s'aperçoit alors que Jean-Christophe est revenu auprès
d'elle
SYLVETTE.
Ah ! Je ne t'avais pas entendu...
JEAN-CHRISTOPHE, (désignant d'un geste de la
main, la source des informations récemment entendues).
Alors, selon tes théories, ça, là,
c'était quoi, de la vie ou de l'existence ?
SYLVETTE. A ton avis, quelle proportion des deux
? Deux cuillères à soupe de survie, dans un grand
ras le bol de vie de chien, un assaisonnement de soucis et de
pagaille, un saupoudrage de bonnes intentions et de poudre aux yeux, des louches de pouvoir, politique, militaire,
financier, des pincées de cours de Bourse et des pincements
au coeur, et combien d'existence ?
JEAN-CHRISTOPHE. Dis donc, tu es optimiste, toi,
quand tu fais ta cuisine !
La
sonnette de l'entrée retentit, les deux se regardent, Sylvette
se débarrasse de son tablier, pousse son mari vers la salle
SYLVETTE.
Vas y, va leur ouvrir, j'arrive !
Noir
sur la scène, fin de la première séquence
ACTE
2 (première partie)