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Circulation
Les premiers mois, j'ai utilisé pour circuler en ville
le véhicule qui m'était attribué, une
berline antédiluvienne fabriquée par Willis,
une marque qui produisait des Jeeps. Cette voiture présentait
des particularités l'apparentant à un gag perpétuel.
Dès qu'elle atteignait 40 kms à l'heure, son
capot, dont la fixation ne tenait pas, s'ouvrait avec une
majestueuse lenteur pour s'élever à la verticale
devant mon pare-brise. Il me fallait donc décélérer.
Pour cela, comme la pédale ne revenait pas seule à
sa position, je devais me contorsionner pour atteintre avec
la main ladite pédale et la remonter. Mon siège,
totalement dégarni, nécessitait un coussin ou
un boubou plié en six épaisseurs, si je ne voulais
pas m'embrocher les hémorroïdes sur les ressorts.
La vitre du côté conducteur, brisée depuis
longtemps, était en saison des pluies remplacée
par une toile cirée du plus bel effet. Et enfin le
volant justifiait un long apprentissage pour sa manipulation,
car les trois quarts de son premier tour se montraient totalement
sans effet, la manoeuvre ne commençait à permettre
de tourner qu'au delà de cette rotation. Heureusement,
d'une part le risque ou la probabilité, plutôt,
de croiser une autre voiture s'avérait à peu
près nul, d'autre part l'état de la piste «
en ville » n'autorisait guère de rouler à
plus de trente à l'heure.
Par la suite, j'ai récupéré une vieille
Land Rover en état de marche, qui a facilité
mes circuits, et en fin de séjour lorsqu'au cours de
déplacements nous emmenions la petite avec nous, nous
avions réquisitionné un véhicule de luxe
marqué Unesco, un pick-up américain moderne
et presque confortable pour des distances plus longues, dont
nous reparlerons.
Carburant
Un mot pour signaler un problème courant. La première
voiture, si elle était fort peu performante, ne laissait
pas de possibilité de siphonner le réservoir.
La Land Rover, par contre, a fait l'objet de nombreuses mauvaises
surprises, nos voleurs allant par exemple jusqu'à sectionner
le tuyau de remplissage du réservoir situé derrière
la cabine pour vider le contenu et me laisser à sec.
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Corruption
Ce paragraphe peut s'insérer juste après cette
notion de détournement d'essence, car le vol représentait
l'aspect initial et déclenchant de ces moteurs financiers
aboutissant à la corruption. Ainsi, les médicaments
misérables dont nous disposions, à titre totalement
gratuit pour les patients, étaient aisément
dérobés, en particulier les formes injectables
de certains produits, et objets ensuite de revente sur le
marché. Ceci avec la complicité, voire le bénéfice
indirect, des gendarmes. Comme si, théorie permanente
de bien des décideurs, payer augmente l'effet des traitements
ou thérapies.
A un moment, du matériel de literie disparaissait des
bâtiments destinés aux malades. Au point que
j'ai dû porter plainte à la gendarmerie, dans
le but de faire cesser ces vols. Après une longue période
sans suite, j'ai fini par apprendre par une indiscrétion
que ce mobilier se retrouvait tout simplement dans la propre
case de l'économe.
Tous les fonctionnaires ou quasiment obtenaient leurs postes
par corruption, de l'avancement de la même manière.
Il était déjà totalement coutumier d'affirmer
que toute l'Afrique était régie et gouvernée
par la corruption, des années avant de constater, les
fameuses affaires de notre monde politique occidental apparaissant
enfin au grand jour, que nos propres modes opératoires
n'ont rien à envier mais sont exactement identiques.
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Certificats
Quelques mots amusants sur une pratique délicate de
mon exercice sur place. L'état civil n'existant pas,
certains citoyens devenaient victimes d'une impossibilité
de prouver leur âge. Ce qui perturbait des demandes
précises, retrouvant un peu les éléments
décrits précédemment. Pour obtenir une
bourse d'études, pour accèder à un poste
précis, simples exemples, il était nécessaire
d'avoir un âge situé entre deux extrêmes,
ni trop jeune, ni trop âgé. Le recours s'intitulait
certificat d'âge apparent , un document qui, notons
le même si cette notion est inconnue de nos praticiens,
est également valable pour faire valoir des droits
à la retraite, chez un maghrébin sans état
civil auquel a été attribuée une date
de naissance arbitraire, généralement 1er Janvier
de telle année, très souvent fausse au point
de les lèser grandement. Avec un certificat du médecin,
déposé au consulat, confirmé par une
autre médecin fonctionnaire, le sujet lésé
retrouve ses droits.
Donner un âge à un africain est fréquemment
très difficile, la tendance étant de vieillir
considérablement les plus anciens, et les plus, ou
les trop jeunes, tentant de s'adjuger trois ou quatre années
de supplément s'ils y gagnent quelque avantage. De
temps en temps, un défilé de postulants se produisait
lors de ma consultation. Pour les femmes je tentais de savoir
si elles avaient encore, ou déjà leurs règles,
combien elles avaient mis au monde d'enfants, de quelle taille
étaient ceux-ci. Car l'âge n'est pas un élément
connu, par contre elles montraient, de la main placée
verticalement à des niveaux différents, la cascade
de leurs rejetons. Pour les hommes, les dents restantes, l'état
général, chez les jeunes la présence
ou non de dents de sagesse. Exercice amusant et très
difficile.
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Chirurgie
LE chapitre énorme. L'exercice de cet art en brousse
africaine est dépendant de facteurs insoupçonnés
dans nos pays nantis. Le matériel, d'abord : je ne
disposais ni de perfusions, ni de sang, ni de réanimation.
Juste un simple commentaire sur les perfusions. Lorsqu'en
début de séjour, un arrivage de France de quelques
flacons en verre m'est parvenu, une bonne moitié des
bouteilles étaient brisées dans le transport.
Mais quand, entre temps, la découverte de flacons en
plastique est intervenue, évidemment sans concertation
ni réflexion me fut envoyé un nouveau lot «
moderne ». Mais, dans les bateaux de transport, puis
les camions, les rats parvenaient à percer le plastique,
et se régalaient des liquides sucrés ou salés.
Résultat, il ne restait à l'arrivée aucun
flacon disponible. Mieux valait donc du verre, en partie seulement
brisé, que ce néant. Les médicaments
dont nous disposions étaient nuls, de type dernière
guerre, et les colis très gentils et attentionnés
des organisations caritatives, toujours du fait d'une absence
de concertation, représentaient l'occident : antidépresseurs,
anxiolytiques, produits pour le coeur et la tension. Rien
d'utilisable pour nous, qui aurions nécessité
antibiotiques, pansements, pommades, antalgiques.
Le genre de chirurgie ensuite est très différent
de celle de nos latitudes. Une sorte de «chirurgie de
guerre». Quand un homme étrangle sa hernie à
100 kms du poste chirurgical, il se met en route à
pied, fait escale dans les villages en cours de route pour
se restaurer et se reposer chez les « frères
» qui l'accueilleront toujours. Six jours après,
il parviendra jusqu'à moi. Heureusement pour lui, car
au prix de souffrances abominables, mais son père,
ses frères les lui ont décrites déjà
car ils les ont connues, il a vu éclater sa hernie
comme une sorte d'abcès, répandant en route
son contenu sanieux, fermenté, évacuant à
l'extérieur son ventre. Il faut alors au chirurgien
réparer une béance considérable, enlever
un mètre ou plus d'intestin, « rabouter »
le reste.
Lorsqu'une femme ne parvient pas à accoucher, si elle
est chanceuse, nous l'avons évoqué, pour rencontrer
un camion assez tôt, elle bénéficiera
d'une césarienne. Sinon, son utérus va finir
pas se rompre, sous l'effort d'expulsion. La rupture utérine
est un cataclysme inimaginable sous nos latitudes. Une hémorragie
interne considérable, une menace de mort imminente.
Le chirurgien rattrapera la situation avec l'aide de la chance
ou de la providence, et... des circonstances.
Car au delà du matériel, se présente
la question des conditions. De jour, tout est envisageable.
De nuit, tout devient un cauchemar, un casse-tête. Quelquefois
j'ai placé ma voiture devant la fenêtre de la
pièce où j'opérais, phares allumés
pour m'éclairer. Très vite, la batterie a rendu
l'âme. Souvent, les lampes torches à pile ont
dépanné, mais en saison des pluies les piles
s'abiment vite, de toute manière les longue durée
n'existaient pas. Sans parler de l'infirmier ivre éclairant
le plafond, le sol, mais jamais le champ opératoire...
La lampe à pression de pétrole aurait été
une admirable solution, mais sachant que les urgences vraies,
immédiates, étaient représentées
essentiellement par les césariennes et ruptures utérines,
les patientes étant alors endormies à l'éther,
inflammable par définition, ni ces lampes ni un banal
fanal à mèche ne pouvaient être envisagées.
Il est arrivé, et en particulier lors de l'unique visite
du Ministre de la Santé de Centrafrique, le seul médecin
diplômé du pays, à l'époque, que
je me retrouve dans le noir absolu au cours d'une césarienne,
avec les glouglous du sang qui coule pour seul repère.
Ce qui m'avait, un rien « sadiquement » plu, car
ce brave homme de ministre, débarquant dans «
mon fief » en costume trois pièces par 37°
à l'ombre, l'air suffisant, arrogant, avait attaqué
d'emblée en me lançant : « votre hôpital
est bien sale ». Ce à quoi j'avais répliqué
instantanément : « excusez moi, Monsieur le Ministre,
ne confondons pas, nous parlons de VOTRE hôpital ! »
Malgré la température, nos relations avaient
ressenti immédiatement un grand coup de froid.
Cette visite officielle suivait un courrier de réclamation
de ma part aux autorités, demandant tout simplement
de quoi verser les salaires du personnel, acheter du pétrole
pour stériliser, renouveler le matériel, effectuer
en quelque sorte mon et notre travail dans de meilleures conditions.
La réponse avait été sans ambage, traduite
en « si vous éprouvez des difficultés,
fermez votre centre médico-chirurgical et cessez de
nous importuner » Et j'avoue que sentir, dans l'obscurité
totale, le ministre en ma compagnie au cours d'une césarienne
inopinée lors de sa visite, en attendant qu'un assistant
me trouve une lampe de poche en état de marche, me
stimulait à l'aide d'une ironie mordante et jouissive...
Caractérisent encore cet exercice si particulier de
la chirurgie de brousse africaine les indications opératoires
et les spécificités liées à l'état
sanitaire. Quand il fallait envisager une hystérectomie,
l'utérus à enlever était généralement
énorme, remanié par dix épisodes d'hémorragies,
de surinfections, et tous les tissus internes adhéraient,
collaient les uns aux autres, rendant très délicate
cette intervention. Les hernies étaient fréquemment
« éléphantesques », d'un volume
considérable, justifiant une plastie de la peau, pour
retrouver un aspect à peu près normal. Et lorsqu'il
m'arrivait de « plonger » un peu au hasard, dans
un ventre durci, aigu, douloureux au possible, sans trop savoir,
faute de radio, de laboratoire, encore moins de ces échographies
merveilleuses non inventées à l'époque,
faute tout simplement de tout, sans électricité,
sans eau, sans parfois même sur moi de vêtements
chirurgicaux si notre stock était épuisé,
ou la stérilisation irréalisable, des surprises
m'apparaissaient. Un abcès amibien du foie, un kyste
géant éclaté dans l'abdomen, une occlusion,
un kyste énorme d'un ovaire en train de sphacéler,
autrement dit de « pourrir ».
Au bout du compte, j'ai effectué 450 interventions
chirurgicales majeures, avec 5% de casse, ce qui est un merveilleux
résultat, lié à l'invraisemblable résistance
de ces personnes qui rencontraient généralement
un médecin pour la première fois de leur vie.
Quelques « miracles » comme cette femme arrivée
avec un utérus rompu, littéralement saignée
à blanc, exsangue, ne présentant plus ni pouls
palpable ni tension mesurable. J'ai décidé de
ne lui appliquer qu'une anesthésie locale sur le trajet
de l'incision du ventre, elle ne réagissait plus à
rien. Un jeune homme s'est présenté en même
temps comme étant « son frère »
appellation ne recouvrant pas de réalité biologique
souvent, mais plutôt de communauté. Mais, ayant
retrouvé au fond d'un tiroir des réactifs périmés
de détermination des groupes sanguins, j'ai tenté
le coup, en testant le sang des deux protagonistes. Qui se
sont montrés compatibles. Et pour l'unique fois du
séjour, j'ai transfusé directement « de
bras à bras » le sang du garçon, qui a
probablement, avec la réparation de son utérus,
sauvé cette femme. Elle est repartie à pied
dix jours plus tard.
Un souvenir de cauchemar Hitchcockien : l'attaque des termites,
en pleine nuit, au cours d'une césarienne avec éclairage.
Saison favorite alors de ces charmantes bêtes. Une nuée
de volatiles à quatre ailes se répand dans le
bloc opératoire, s'insinuant dans mes narines pendant
que j'opère, derrière mes lunettes, sous mon
masque, et tombant malheureusement dans le ventre ouvert de
la pauvre opérée. Malgré une résistance
virulente de mon infirmier et moi-même, nous ne sommes
pas parvenus à éviter l'intrusion des termites
dans les viscères, et la patiente est décédée
d'infection abdominale généralisée une
semaine plus tard.
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Communication
Nous avons tant à apprendre de la sagesse africaine.
Le jeune blanc-bec médecin tout neuf, naïf, entreprenant,
attaque bille en tête, décidé à
sauver l'humanité en souffrance. Il se démène,
se dépêche, exhorte ses troupes, « allez,
allez, préparez vite tout ce qu'il faut, ne perdons
pas de temps » Après quelques jours d'excitation
chez le praticien occidental, d'étonnement blasé
chez les autochtones, un sage parmi eux se jette à
l'eau, pour parler avec le docteur, communiquer : «
pourquoi tu t'énerves comme ça, mon docteur,
si elle doit mourir la femme elle meurt, c'est tout, alors
tu prends le temps, et puis c'est tout »
Réactivation du rêve, presque prémonitoire
: à peine arrivé sur mon poste depuis deux jours,
une blanche, de passage en safari, déclenche son appendicite
à Bangassou ! La réalité rattrape la
fiction. De sorte que ma première opérée
sur place auré été une européenne
avec une appendicite. Aucun blanc n'avait jamais été
opéré là-bas, et aucune appendicite,
maladie des occidentaux (si souvent abusivement désignée
d'ailleurs, dans nos pays l'angoisse domine tous les diagnostics)
La communication entre mon équipe et moi n'étant
pas établie encore, et mon assistant tremblant de peur
à l'idée de « rater » une européenne,
il n'est pas cette fois décontracté comme il
le sera à l'extrême tout le reste du temps, et
il commet plusieurs erreurs, casse un fil de suture, laisse
échapper une pince, en bref il n'est pas du tout à
l'aise. Mais la blanche se sortira parfaitement de l'aventure.
Et j'opérerai par la suite deux autres européens
en cours de séjour, d'interventions programmées
cette fois, non urgentes.
Une terreur des membres des familles : les quelques rares
fois où nous devions endormir entièrement des
patients, leurs proches les estimaient morts, parce qu'ils
ne répondaient pas, comme d'habitude, au sortir de
l'intervention. Une autre communication s'avérait délicate,
celle consistant à expliquer des soins et des mesures
a priori inacceptables pour les accompagnants. Ainsi ce grand
père, dont le petit-fils avait été victime
d'une fracture du fémur. Dans ce cas, j'installais
l'enfant « en traction au zénith » ce qui
signifie sa jambe, enveloppée de pansements, mise à
la verticale par rapport à son lit, grâce à
un système de traction. De la ficelle, des poulies
fabriquées avec des rouleaux de sparadrap vidés,
enfilés sur des morceaux de bois horizontaux accrochés
sur des portants, au bout un panier de gaze, empli de cailloux
pour constituer un contre-poids. Et chaque matin lorsque je
passais vérifier, le grand-père avait coupé
la ficelle, estimant sans doute inhumain, ou simplement illogique,
ce traitement. J'ai dû lui expliquer dix fois avant
qu'il admette que c'était pour aider l'enfant à
guérir. Un autre aïeul aussi. En pleine nuit,
j'avais réduit et plâtré la fracture du
poignet de son gamin. Le lendemain je demande des nouvelles
: le grand-père avait été tremper le
plâtre dans le marigot, ne comprenant pas que l'on inflige
cela au petit garçon... .
Croyances
C'est volontairement dans ce paragraphe que je vais placer
un autre élément assimilable à ce domaine.
Chacun croit, et ce n'est qu'humain, justifiant ses choix,
sa vie, son rôle, être le plus indispensable,
le plus fort, le plus efficace. De retour dans notre pays,
installé en médecine générale,
je m'amusais au plus haut degré du discours de mes
confrères chirurgiens, ignorant d'où je venais.
« Allo, oui bonjour c'est Machin, je tenais à
te donner des nouvelles de ton patient. Eh bien dis donc on
peut dire qu'il était plus que temps !! Moins une,
mon vieux ! Bon, enfin j'ai fait le maximum, j'ai réussi
à opérer sa hernie étranglée sans
être obligé de toucher à son intestin,
mais je crois vraiment qu'on a eu chaud, tu sais une heure
de plus et j'étais bon pour réséquer
une anse grêle, cela n'aurait pas été
la même affaire, je te le dis ! Enfin, allez, on s'en
sort bien pour cette fois ci, allez à bientôt
vieux ! »
Les croyances profanes des uns et des autres sont on ne peut
plus instructives. Les africains prennent un soin infini de
leurs « fous » ceux qui pensent différemment.
Nous nous les cachons, les internons, les empêchons
de nuire d'effrayer. Eux leur octroient le pouvoir de savoir
communiquer différemment, avec les dieux, les ancêtres,
et c'est pourquoi le fou du village est protégé,
vénéré, respecté, aimé,
soigné, assisté. Car il a ce rôle d'intermédiaire
entre « un autre monde » et celui-ci.
En écoutant attentivement, en observant, on apprend
des Africains leurs relations avec les termes qui leur sont
propres. Rien n'est en réalité fruit d'un hasard,
dans leurs expressions. Si un homme se dit, par exemple, envoûté
par un sort, son « mal », son affection sera liée
à une crise de niveau égal au sien. Il aura
pris un repas avec sa belle-soeur, qui est la plus habituelle
deuxième épouse potentielle, en cas d'envie
ou de besoin, mais si elle l'a mal accueilli, lui a parlé
d'une certaine manière, l'a regardé bizarrement,
il est « atteint » il a été touché
par le sort et va devenir malade. Une personne qui se dit
victime d'un « génie » fait allusion à
une conflit de niveau générationnel, il a «
fauté » contre ses parents, et un mal s'est emparé
de lui. Et enfin celui ou celle qui est traqué par
un « esprit » apporte une référence,
aux ancêtres, il a bravé une loi des anciens
et est puni.
Il existe une distinction instinctive permanente entre ce
qui est pouvoir, la lutte entre eux des semblables, le territoire,
la force, la conquête, ce qui appartient à la
reproduction, c'est à dire les parents, ou ce qui fait
pousser la récolte, ce qui pérennise une espèce
animale, humaine, végétale, et enfin ce qui
est déterminé par la loi, supportée et
rapportée par les anciens, le chef de village, les
représentants de l'ordre acquis traditionnel.
Et, en extrapolant, avec une perspective tournée vers
l'avenir, j'ai depuis toujours tenté de transmettre
quelque chose de ces éléments à mes étudiants,
dans des cours de Faculté comme celui sur Culture,
Origine, Religions, Croyances et Médecine, pour leur
montrer que, confronté à un patient issu d'une
culture africaine, ou de certaines religions, ou porteur de
croyances spécifiques, la méconnaissance absolue
de ces items d'origine, associée à l'application
récitative des acquis de notre enseignement occidental
scientifique mènera le praticien vers un échec
total, une ignorance complète de la signification de
signes, de symptômes, et l'utilisation de traitements
inadaptés et donc inefficaces.
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Tous
droits réservés. © François-Marie
Michaut 1997-2004 |
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