Rassurez-vous, ce mot dallure savante est,
à ma connaissance comme à celle de notre
fouineur virtuel Google, une pure invention. Sans la
moindre parenté avec le sinistre révisionnisme
que chacun connait. Ce qui nous intéresse ici,
et comme toujours en observant ce qui se passe dans
notre fragile monde de la santé, donc aussi de
la santé du monde, cest une pathologie
aussi étrange que chronique. Une maladie systémique,
comme nous les aimons ici à Exmed.
Pas un mois ne se passe avant que des esprits observateurs
ne détectent plusieurs failles dans les rouages
de nos organismes sociaux et professionnels. Peu importe
que cela prenne les habits tonitruants dun scandale,
comme dans laffaire de Vincent Humbert, forts
prisés des gens de la presse et du spectacle,
ou bien lapparence austère dun rapport
ou dune étude scientifique. Nous arrivons
à la même conclusion sous forme de constat
: quelque chose ne va pas dans notre façon de
faire. Vite, il faut mettre une rustine à cette
chambre à air qui fuit.
Émeutes dans les banlieues, crimes crapuleux
- dont nous noublions pas ceux commis contre des
médecins dans leur cabinet, - dégâts
provoqués par lamiante, le sang contaminé,
le tabagisme passif, la délinquance routière,
lapparition dépidémies que
nous ne savons pas éviter, les sujets ne manquent
pas. Chacun a de plus en plus conscience que nous sommes
très loin de maîtriser tous les risques
de notre vie humaine. Alors que nous propose-t-on pour
remédier au déficit de la sécurité
sociale, à linsécurité routière,
à la désertification médicale des
campagnes et mille autres sujets ? On se hâte
de construire une réforme. Oui, on réforme
à tour de bras, comme on réformait jadis
les appelés du service militaire inaptes physiquement
ou psychiquement. Réformer, cest donner
une autre forme à quelque chose. Tout comme Luther
et Calvin voulurent purger léglise de Rome
de bien évidentes dérives.
Ce qui nous intéresse cest que notre manie,
pour ne pas dire notre frénésie, des réformes,
celle qui pourrait être nommée le réformationnisme,
sattaque toujours à un système déjà
existant. Le jeu, sy lon peut dire, consiste
à en analyser les divers éléments
constitutifs, sans chercher à en éliminer
aucun, pour simplement les agencer autrement. Cest
un peu comme si on conserve les 52 cartes dun
jeu, toute réforme nen changeant habilement
que lordre dutilisation. Si lon prend
vraiment conscience de cette vision systémique,
lillusion disparaît delle-même
: aucune réforme ne peut réussir quand
elle nest fondée que sur une redistribution
des éléments existants. Le fait que la
réforme prend rituellement la forme dun
texte législatif ou réglementaire afin
de contraindre chaque personne concernée nest
pas de nature à stimuler les énergies
individuelles.Le réformationnisme,
nayons pas peur de parler sans détour,
est une impasse pour résoudre nos problèmes
humains.
Faut-il alors en conclure que jamais rien de ce qui
ne va pas ne peut changer ? Que nous sommes condamnés
à vivre éternellement les mêmes
malheurs, à subir les mêmes injustices
? Cest alors compter pour nulle toute possibilité
de changement en nous, en chacun dentre nous.
Voilà qui est de nature totalement différente
: dun côté ce qui nous est imposé,
et dun autre côté ce que nous faisons
parce que nous sommes persuadés que cest
la meilleure voie. La société nest
pas une abstraction désincarnée : elle
commence dabord par être ce que chacun de
nous est, donc parce que chacun de nous fait. Cest
ce que nous sommes, pas ce que nous voudrions, devrions
être ou paraître, pas ce que les autres
nous imposent, qui nous amène en vérité
à agir. Si nous avons clairement en tête
que la société ce nest pas uniquement
les autres, que la, notre, santé, ce nest
pas la seule affaire des professionnels, des industriels
et des politiques, notre manière de comprendre,
notre façon dagir en sont profondément
et définitivement changés.
Quun sang impur abreuve nos sillons
; qui oserait actuellement proférer en France
un tel appel au racisme et au meurtre ? Pour cela, ami
lecteur, aucune réforme des paroles de notre
hymne national na été nécessaire,
nest-ce pas ? Cest uniquement notre perception
des choses qui sest réformée delle-même
... sans tambours ni trompettes. Tout simplement, parce
que nous avons changé.
Pour les praticiens systémiciens, la différence
entre les deux types de changement que nous venons dillustrer
est fondamentale. Quon le nomme faux changement
et vrai changement, ou quon préfère
changement de type 1 dans le premier cas, et changement
de type 2 quand on parvient à passer dun
niveau logique où on était enfermé
à un autre encore inexploré, ne change
rien. Voilà de quoi alimenter nos réflexions,
sans oublier, il nest pas superflu de le redire,
den tester chacun pour son propre compte la pertinence.
NDLR : Comme l'Internet est le moyen idéal
pour le faire, il ne faut vraiment pas s'en priver,
ami lecteur. Si ce texte vous touche, vous plaît,
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FMM, webmestre.
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