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La santé est notre affaire à tous


La patiente
Elle sourit carrément, parce que cette sorte de… jeu des devinettes « à base de non réponses » commence à lui plaire, ou à la rassurer, en voilà un qui m'écoute, il entend même les silences.
En fait c'est trois fois rien, vous savez. On nous a changé nos horaires, je fais équipe avec des gens différents du coup, et puis certaines méthodes ont été modifiées, enfin vous savez ce sont toujours les mêmes histoires partout, restrictions de budget, et par voie de conséquence matériel non renouvelé, finalement c'est au détriment…
Le médecin
Il attend de nouveau pour écouter si elle termine ou non cette phrase.
Au détriment de…la qualité vous voulez dire ? Vous avez l'impression que les petits deviennent un peu victimes des régressions, c'est ça ?
La patiente
Oh, régressions, c'est sans doute beaucoup dire, mais comment exprimer cela… ?
Le médecin
Négligence, désintérêt ?
La patiente
Le praticien note depuis un moment qu'elle a évolué dans son attitude, elle s'ouvre un tout petit peu, elle a écarté une fois ses cheveux, a levé les yeux, parle plus nettement, dégage quelque peu ses épaules en conservant son manteau. Comme si… elle s'intéressait à son propre « cas », comme si des perspectives s'ouvraient elles aussi en même temps qu'elle.
Oui, c'est exactement cela, entre ces deux notions là, précisément. Vous savez, (et elle s'anime de plus en plus, bougeant les mains) pour moi quand on choisit un métier comme celui-là, s'occuper d'enfants, c'est… c'est quelque chose comme une passion un peu, en tout cas un don de soi, ils ont besoin de…eh bien d'amour, ces enfants, alors quand je vois certains collègues effectuer leur boulot quasi automatiquement, et je te torche un nez, des fesses, la bouche, avec la même indifférence mécanique, moi ça me fait mal, c'est vrai oui, mal, carrément…
Le médecin
En la regardant avec gravité et gentillesse profonde.
Vous avez des enfants ?
La patiente
Elle détourne son regard, recule dans sa chaise, secoue et plie la tête, agite trois fois une main comme pour dire non d'avance avec le geste avant de devoir l'affirmer avec un mot.
Non j…
Le médecin
Il a perçu que ce « j » était appuyé, comme s'il allait pouvoir dévier du « je » à autre chose, comme « justement » par exemple.

Non…justement, ou non je n'en ai pas ?
La patiente
Elle cherche un mouchoir quelque part, dans une poche de son manteau, puis dans la petite pochette qu'elle a posée sur la chaise voisine, qui doit contenir des clefs, des papiers…
Elle va pour parler, renifle, se mouche vaguement, remue les lèvres et finalement se tait.
Le médecin
Votre…votre besoin, ou souci de venir consulter aujourd'hui a quelque chose à voir avec les enfants ?
La patiente
Elle donne l'impression d'hésiter entre sourire d'avoir été devinée, dans ce cas un sourire de soulagement, « tiens nous progressons, il a déjà compris », ou bien d'étonnement « mais cela se voit donc tant que cela ? » et une envie de pleurer parce qu'elle se sent inexorablement menée vers la suite, vers l'accomplissement de ce pour quoi elle est venue. Elle regarde longuement le médecin avant de répondre, un mélange d'attention soutenue, de crainte presque, et d'espérance : cette main qu'il me tend, est-elle destinée à m'attirer, me calmer, ou m'imposer, me freiner ? De cet imbroglio de sentiments naît une réponse minimaliste :
Oui…
Le médecin
C'est un métier que vous avez choisi, ou le résultat d'un hasard ?
La patiente
Une…une occasion, des circonstances et une opportunité, disons…
Le médecin
Mais cette activité répondait finalement assez bien à une attente, à un investissement de votre part, et s'est avérée porteuse de satisfactions, c'est cela ?
La patiente
Oui. Cela s'est même rapidement mis à m'intéresser énormément, à me motiver, je me suis impliquée considérablement dans ce travail…
Le médecin
Et c'est pourquoi le comportement ou l'attitude de certains collègues, les modifications des programmes, de l'organisation, de toutes sortes de modalités variables, vous ont un peu… bousculée, heurtée ?
La patiente
Elle hoche la tête affirmativement, avec cependant une moue hésitante.
Le médecin
Je ne vous sens pas complètement convaincue, je me trompe ?
La patiente
Elle donne l'impression de rentrer de nouveau un peu à l'intérieur d'elle-même, attitude, posture, engoncée, réfugiée une fois encore derrière ses cheveux, mais davantage par besoin de répit, de réflexion, d'intériorisation que par un repli véritable. Quand elle parle, c'est de manière concentrée, détachant les mots, affirmative :
Non, c'est vrai, il n'y a pas que cela. C'est…très mélangé, entre les enfants dont je m'occupe, ceux de mon travail, et la notion d'enfants en général…
Le médecin
Pour aller plus loin, est-ce que l'on peut séparer cette notion de…maternité, et disons pour trouver un mot différent, celle de puériculture ? Ce serait ça ?
La patiente
Elle s'ouvre soudain, sourit, se dégage.
Exactement, oui, c'est ça !
Le médecin
Souriant,
Alors vous êtes venue me parler de quoi, de maternité, ou de pédiatrie ?
La patiente
D'un seul coup en alerte, comme en douleur, mais décidée,
De maternité.
Le médecin
Oui ?
La patiente
En fait, comment vous dire ça, je me demande carrément si je suis…normale ?
Le médecin
Dans quel sens, physiquement, moralement, ou encore sous je ne sais quel angle ?
La patiente
Décidée, elle entrouvre son manteau, laisse aller plusieurs fois sa main à revers dans sa frange, comme on ouvrirait un volet, un couvercle, elle soulève aussi des deux mains les ailes de sa chevelure, et comme si elle avait une bonne fois « aéré » ses idées, elle se lance :
Il faut que je vous raconte.
Elle entrecoupera tout ce passage de récit de silences, de pauses de réflexion, changeant de rythme, concentrée en permanence comme si elle passait un oral d'examen ou d'embauche.
J'ai une belle-mère charmante. La mère de mon mari. Adorable. Il faut dire que j'ai perdu ma mère très jeune, enfin j'avais dans les 13 ou 14 ans, cela a été très difficile, une mauvaise période pour une fille, les règles, tout ça, l'adolescence, c'est bizarre mais j'en ai terriblement voulu à ma mère de… de nous avoir quittés… je disais laissés, à l'époque, elle était très malade, une espèce de dépression, vous savez, enfin vous devez imaginer, on ne comprend pas tout d'un seul coup… Bon avec le recul j'ai compris que cela avait été son choix…sa décision d'arrêter là, sans doute qu'elle ne supportait plus, j'imagine que cela a dû être effroyablement difficile, et à subir et à décider…
Elle hésite, se frotte le nez, donne l'impression de devoir chercher un mouchoir, puis elle s'ébroue, renifle, et renonce à se moucher, elle essuie furtivement la commissure d'un de ses yeux, puis l'autre, se reprend et poursuit.
C'est étonnant, c'est bizarre même de ne pas parvenir à accepter l'idée que ma mère avait peut-être…le droit après tout de choisir de décider quand elle allait mourir plutôt que…d'attendre que ça vienne, je ne suis pas sûre d'y être encore arrivée, comme si elle nous volait sa mort à elle, vous…vous comprenez ? Avec un regard aigu vers le médecin.
Le médecin
Nous sommes déjà dans votre interrogation à propos de « normale » ou non ?
La patiente
Réfléchissant quelques secondes, la main dans les cheveux.
Un peu…sans doute, mais ce n'est pas vraiment à ça que je pensais… Non, tout ceci pour dire que ma belle-mère, gentille, attentive, douce, a remplacé ma mère je pense, enfin elle ne peut pas être ma mère, naturellement, elle est devenue j'allais dire sa remplaçante non cela non plus ne serait pas exact, comme dit-on son substitut, une…compensation ?
Le médecin
Vous vous aimez toutes les deux, en résumé…
La patiente
Elle sourit largement, mais intérieurement, pour elle, sans partager ce sourire volontairement comme lorsqu'on relève la tête vers l'autre, là elle garde le visage baissé ;
Oui. Et c'est justement. Ma belle-mère a une fille. Enfin mon mari a une soeur autrement dit, qui a deux ans de moins que moi, et qui s'est mariée l'année dernière. Et voilà que…
Là sa voix se casse soudain, elle plonge son visage dans ses mains et s'arrête, avec une sorte de sanglot sec, inexprimé.
Le médecin
Il reste volontairement silencieux, hésite à rapprocher la boîte de kleenex qui se trouve à proximité de la patiente, le fait extrêmement discrètement, et attend.
La patiente
Excusez moi Julie, enfin ma belle-soeur, elle… Eh bien elle est enceinte quoi !
Cette fois elle craque, pleure silencieusement, un bon moment, pendant que le médecin attend en l'observant. Puis elle finit pas découvrir le paquet de kleenex offert, se sert, se mouche, et ébauche une grimace.
C'est…c'est complètement ridicule, je… c'est bien pour elle, elle est contente, mais…
Le médecin
Mais c'est cela le sujet de la consultation d'aujourd'hui, d'accord ?
La patiente
Elle hoche la tête pour approuver mais se tait. Le médecin attend longtemps, de façon à lui laisser le temps d'une part de récupérer, mais aussi d'ouvrir la porte à toute éventualité de reprise si elle le souhaite ou y parvient. Devant son silence prolongé, il interroge.
Le médecin
A quel…niveau êtes-vous…frustrée ? La grossesse, la belle-soeur, ou la belle-mère ?
La patiente
Elle sourit dans son chagrin et ses larmes, soulagée ou surprise de cet éventail de possibilités. Et elle regarde le médecin.
Tout, tout ça en fait…
Le médecin
Je m'en doute un peu, mais dans quel ordre, ou plutôt dans quel classement en…intensité, en hiérarchie ?
La patiente
Oh, c'est assez compliqué ça, je n'avais pas réfléchi, ou mesuré.
Le médecin
Justement, spontanément comme cela, qu'est-ce que vous vous êtes dit en tout premier ? Ce n'est pas juste, mais ensuite : pourquoi elle et pas moi ? ou pourquoi elle d'abord ?
La patiente
Elle répond rapidement.
Oui, oui oui, pourquoi elle d'abord, pourquoi elle en premier, comme s'il devait y avoir une espèce d'accord entre nous vous voyez ? Elle venait de se marier, elle est la plus jeune, alors pourquoi me… pourquoi elle en premier ?
Le médecin
Quand vous avez commencé avec « pourquoi ME » cela voulait dire pourquoi ME faire cela, quelque chose dans ce genre ? Presque comme si c'était contre vous ?
La patiente
Oui, c'est vrai, c'est terrible, comme si elle me…
Le médecin
Vous…trahissait ?
La patiente
Oui. Oui, comme si elle me trompait, n'avait pas respecté un accord, je ne sais pas… Vous voyez que vous allez me trouver anormale.
Le médecin
Souriant et la regardant,
J'ai dit cela ?
La patiente
Non mais… Vous pensez que ce n'est pas…normal de... de m'estimer trahie ?
Le médecin
Vous aviez eu l'occasion de parler de cela avec votre belle-soeur, je veux dire d'évoquer le sujet d'une grossesse pour l'une ou l'autre ?
La patiente
Oui. Une fois ou deux. Quand nous parlions de cela, elle riait, et disait « oh, tu seras enceinte avant moi, bien sûr, c'est logique ! »
Le médecin
Et c'est comme si elle n'avait pas respecté cette sorte…d'accord tacite ?
La patiente
C'est ça, mais sans doute pas seulement.
Le médecin
Oui ?
La patiente
C'est aussi comme…une peur, je lui en veux, à coup sûr, même si c'est…irrationnel ou au moins non mérité, mais je crois que j'ai peur…
Le médecin
De ? Ou de qui, de quoi ?
La patiente
Encore une fois la première réponse qui me vient serait : de ne pas être normale…
Elle regarde le médecin intensément, comme inquiète et en quête de confirmation ou d'un geste. Il sourit gentiment, presque…tendrement, et elle poursuit
Je veux dire par là, vous croyez…vous croyez que ma belle-mère va préférer…
Elle se trouble, paraît encore sur le point de pleurer, s'enroue.
Oh c'est terrible, attendez j'essaie de vous dire ça calmement. Vous comprenez j'aime ma belle-mère comme…comme une mère, je vous l'ai dit, et puis normalement c'était… c'était mon tour d'avoir un bébé la première, et alors je me…
Elle émet une sorte de sanglot.
Je me dis qu'elle va préférer sa fille à sa bru, forcément, elle lui donne un petit-enfant la première, vous voyez ce que je veux dire ?
Le médecin
Il attend d'abord un moment, puis parle très doucement, en se penchant vers la jeune femme recroquevillée, défaite, il l'apaise par le rythme de ses paroles, par la douceur du ton.
Je vois surtout que vous êtes…bouleversée, à un point extrême. Ce qui me dit que cette affaire vous tient terriblement à coeur, comme quelque chose de vital… c'est d'ailleurs le cas puisque c'est bien de vie qu'il s'agit. Mais j'avais une question à vous poser, juste parce que vous venez d'employer cette expression là : vous pensez qu'une jeune femme donne son enfant à sa mère, ou à sa belle-mère, c'est ainsi que vous concevez la situation ?
La patiente
Elle attend avant de répondre, parce qu'elle est un peu interloquée, d'ailleurs paradoxalement son attitude s'est décrispée, elle a un air attentif, interrogateur, perplexe.
Non, enfin oui malgré tout, c'est à dire vous avez raison mais…
Le médecin
Cela voudrait dire que vous, ou votre belle-soeur, vous allez offrir votre bébé à la future grand-mère, comme cela, comme un paquet-cadeau, tiens regarde ce que j'ai fabriqué pour te faire plaisir, comme à la Fête des Mères dans les écoles ?
La patiente
Elle sourit.
Vous avez raison, c'est un peu idiot comme réflexion, non ce que je voulais dire c'est : est-ce que ma belle-mère risque de se mettre à préférer sa fille à sa bru maintenant ?
Le médecin
Qu'est-ce que vous en pensez vous-même ? Cela paraît envisageable ?
La patiente
Elle répond presque trop vite.
Non ! Enfin si, après tout, pourquoi pas.
Le médecin
Ce qui voudrait dire que son critère pour vous aimer vous, ou pour aimer sa fille c'est « la première qui est enceinte a gagné » ?
La patiente
Non, vu comme ça non.
Le médecin
Vous avez une idée de ce que votre belle-mère a aimé en vous quand vous êtes arrivée dans sa vie ?
La patiente
Elle reste longtemps perplexe à réfléchir, puis regarde le médecin comme si elle avait trouvé la réponse à une question d'un oral d'examen.
Que… que j'aie l'air de rendre son fils heureux, je pense !
Le médecin
Cela s'est fait comment, vous vous en souvenez ?
La patiente
Elle sourit, ouvre son manteau soudain comme si elle allait l'enlever, se lève à moitié, puis soulève ses cheveux, se rassied, sourit encore, mais comme si elle était ailleurs.
C'était en plein été… j'étais en petite robe courte toute blanche et simple, je me souviens, mais très jolie, avec un grand pli large devant et une encolure carrée, j'avais aussi les cheveux bien plus courts, je me rappelle, Jérôme, enfin mon mari avait tellement hâte qu'en sortant de la voiture il me traînait quasiment derrière lui par la main, il a sonné et est entré sans attendre, mes beaux-parents habitent un petit pavillon en rez-de-chaussée, avec du carrelage noir et blanc dans l'entrée, c'est bien, sa mère est arrivée, elle s'essuyait les mains sans doute qu'elle venait de terminer sa vaisselle, elle nous a regardés, elle a dit à mon mari, bien sûr il ne l'était pas encore vous vous en doutez, « mais dis donc toi tu m'as l'air excité non ? » lui Jérôme il a seulement répondu, en me poussant en avant « Maman alors voilà, c'est Cécile ! »
Elle s'interrompt quelques secondes, élargit son sourire et repart.
Et elle, elle m'a regardée, elle m'a embrassée de façon complètement naturelle, et puis en souriant à fond, avec les yeux brillants, elle m'a dit : « eh bien bonjour, ma petite Cécile, je vais vous dire un truc, vous devez lui faire de l'effet, parce que je n'ai jamais vu mon fils comme ça ! » Et … . Et je crois, le fait d'entendre appeler maman alors que moi je ne pouvais plus le dire, qu'elle m'embrasse spontanément, et puis sa phrase si gentille, je crois que je l'ai aimée aussitôt. Aussitôt… .
Le médecin
Et apparemment cela a pu être réciproque, à cause de son fils ou de vous et probablement des deux, et cela a continué ensuite, si je comprends bien ?
La patiente
Oui, elle est charmante, généreuse, affectueuse, attentive, vraiment gentille quoi…
Le médecin
Et avec sa fille, comment se comporte-t-elle ? Pareil ?
La patiente
Elle réfléchit d'abord.
Cela ne peut pas… cela ne peut pas être pareil, enfin je veux dire qu'elle l'a toujours connue évidemment, elle se sont…apprises l'une l'autre, il n'y a pas eu cette sorte d’ éléments de…surprise, de découverte rapide, d'investissement réciproque… . En fait pendant que je vous parle je suis en train de me demander si justement… si ce n'est pas ce qui me fait peur, moi j'ai été la surprise, j'espère une bonne surprise, sa fille c'était un domaine connu, acquis, plus nouveau, et d'un seul coup c'est elle qui crée la surprise, elle qui va apporter du nouveau, de la découverte, je crois que… que j'ai peur, tout simplement.
Le médecin
Et elle a émis des commentaires à ce propos, votre belle-mère, vous l'avez revue depuis que vous êtes au courant ? Cela date de longtemps ?
La patiente
Non, de quelques jours, ma belle-soeur l'a annoncé d'abord à sa mère, c'est normal, et puis ensuite à moi elle m'en a parlé lundi dernier…
Le médecin
Et sa mère, qu'est-ce qu'elle vous a dit en vous revoyant après ?
La patiente
Elle m'a embrassée toute contente et excitée, et puis elle m'a dit : «ah ma chérie, tu es au courant, bien sûr pour Julie ? Tu sais je suis bien contente, oh oui ça me fait très plaisir ! »
Le médecin
Ce qui sonne tout à fait naturel, non ? Vous attendiez autre chose ? Qu'elle vous demande pour vous, ou qu'elle fasse une allusion ?
La patiente
Non, justement j'ai eu peur qu'elle commence à dire « et vous alors, vous vous y mettez bientôt ? » ou des trucs comme cela, mais non, elle restait dans son bonheur tranquille et puis c'est tout. Après elle a entrepris de calculer la date, ce que tout le monde fait quoi…
Le médecin
C'est votre belle-soeur qui vous l'a annoncé à vous la première ?
La patiente
Oui
Le médecin
Et vous avez réagi de quelle manière ? « Normale » comme vous dites ?
La patiente
J'ai eu terriblement peur de… la première chose à laquelle j'ai pensé, je m'en souviens comme si cela venait d'avoir lieu, ça a été : pourvu qu'elle ne s'aperçoive pas que, que je suis furieuse, dégoûtée, choquée, pourvu que je ne me mette pas à pleurer alors qu'elle est toute énervée et joyeuse, pourvu qu'elle ne se rende pas compte que…
Elle se trouble comme si elle allait réellement fondre en larmes.
que j'étais en colère à un point ! ! J’avais envie de lui crier dessus, de la…de la frapper oui je crois que j'en aurais été capable…oh c'est affreux, je ne suis pas normale, docteur…
Elle plonge la tête dans ses mains, se secoue et se berce en même temps, prend le temps de se calmer avant que le médecin doucement et posément, l'interroge de nouveau.
Le médecin
Si je vous suis bien, depuis le début, c'est ça le vrai motif de votre venue ici, cela fait plusieurs fois que vous évoquez la… « normalité », ce qui vous a amenée en consultation c'est ce point particulier là, j'ai bien compris ?
Et apparemment cela a pu être réciproque, à cause de son fils ou de vous et probablement des deux, et cela a continué ensuite, si je comprends bien ?
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