Je hais les dictionnaires avec tous leurs grands »D ».
Larousse ou bien Robert, drôles sont leurs idées.
Moi qui me piquais d'être un écrivain lettré,
J'enrage et je déchante en ouvrant mon Littré.
Homonymes, éponymes, antonymes, anonymes,
J'y vois des paronymes en plus des synonymes.
On dit « que je moulusse » et aussi « je cousisse »
Serait-il bon alors, qu'encore j'écrivisse ?
Pressurer, présurer ou bien pressuriser ?
Repère ou bien repaire ? Roder n'est pas rôder !
Cession ou bien session, ou une cessation ?
Servante ou bien serveuse ? Il faut faire attention.
Dessin ou bien dessein, tous sujets à faux pas.
Décrépi ? Décrépit ? « J'absous » n'acquitte pas …
Peigne-cul n'a pas d'S, singulier ou pluriel ;
Essuie-pieds en prend un, même seul à l'appel.
Vantail ou bien ventail ? Ou encore ventaille ?
Prémisses avec prémices amèneront pagaille !
Haire ou bien aire , ère, hère, air, quelle liste !
Placage ou bien plaquage pour un bon ébéniste ?
Sourciller, sourcilier ne sont pas paronymes
Pourtant, leur confusion serait bien légitime…
Des « grands-oncles » au pluriel, mais pourquoi des « grand-tantes » ?
Ces subtiles exceptions me perturbent et me hantent.
Que dire à vénéneux quand il faut venimeux ,
Ou bien à flatulent qui n'est pas flatueux ?
Est-ce du numérotage, une numérotation,
Et la numération, une énumération ?
Si j'oins ces joints, c'est que nous oignions nos oignons !
Collision, collusion ? Gradation, graduation ?
Et si « à mots couverts » est toujours au pluriel,
Pourquoi donc « au bas mot », jamais ne devient tel ?
Morte-eau n'est pas eau morte, eau vive pas vive-eau.
Un timbre à un euro n'est pas timbre un euro.
Et puis, ne pas confondre archer avec archet,
La hanche avec une anche, marché avec marcher.
De même pour dattes et date, ou caddy et caddie.
Parti sans prévenir, il me prend à parti,
Et en tire parti pour s'inscrire au parti.
Ne prenons pas parti, entendons les parties …
Certains sont Laroussiens et d'autres Robertistes
Serais-je Hachettiste ou mieux, un Littréen ?
Moi qui croyais connaître un peu notre français
Les dictionnaires ont su combien j'étais mauvais.
Pourtant, je me le dis « si compliquée soit-elle,
Notre langue est précieuse et on la trouve belle. »
Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin,
Est toujours, quoi qu'on fasse, un méchant écrivain.
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