3102 NALIB ? Voilà un titre dont la signification ne saute pas forcément aux yeux. Un savant lettré me clouerait le bec en signifiant qu'il y a sous roche simplement un anacyclique. Petit parfum, totalement usurpé, d'un trouble psychiatrique que mon cher Dictionnaire Hachette définit ainsi : « mot ou phrase lisible aussi bien de gauche à droite que de droite à gauche». Alors, juste un petit effort de changement de sens, et sur le modèle de l'hébreu et de l'arabe, une lecture inversée de droite à gauche donne la bonne clé.
Pourquoi un tel artifice de présentation ? Juste pour compliquer, par une pirouette graphique, ce que peut avoir de tristement convenu l'exercice classique du bilan de l'année qui s'achève ? Pas vraiment.
Mon propos est une libre réflexion, sans aucune volonté exhaustive, non pas sur ce qui s'est produit au cours des douze derniers mois, mais de ce qui n'a pas eu lieu dans le petit monde dont il est question sur ce site.
Comment procéder ? Quand on a la chance de disposer du triple tamis inventé par mon ami Jacques Blais, et repris rituellement sur toutes les LEM depuis 1998, la voie est toute tracée. Suivons fidèlement ensemble les trois sous-titres.
Le grand divorce entre les citoyens et les produits de l'industrie pharmaceutique s'est encore accentué. La balance entre les risques de mieux en mieux connus (et souvent médiatisés) et les bénéfices promis pour l'ensemble des vaccins rend les citoyens de plus en plus méfiants. Les pouvoirs publics eux-mêmes vantent beaucoup moins la vaccination anti-grippale. Le bruit court, je l'ai entendu furtivement sur France-info, que la France ne serait plus le champion mondial de la consommation de psychotropes.
Qu'en est-il du rapport de confiance existant entre les patients et leurs soignants ? Aucun écho d'une dégradation (pas plus, soyons juste, que d'une amélioration) n'est perceptible. Mais la question intéresse-t-elle les médias, ou nos dirigeants dont ils sont l'écho quasi pavlovien.
Les relations entre les médecins, les pouvoirs publics et les assureurs se sont encore détériorées. Monter les uns contre les autres afin de mieux manipuler l'opinion en se présentant soi-même comme le seul défenseur crédible ou le chevalier blanc, contre toutes les «dérives» possibles et imaginables de notre galaxie soignante est un destructeur sport national.
De grands oubliés ne parviennent toujours pas à faire entendre leur voix, comme s'ils n'avaient aucune existence aux yeux de la population. Juste pour mémoire, c'est, entre autres, le cas des sages-femmes et des psychologues cliniciens.
Il n'y a aucun soin digne de ce nom qui soit possible sans le respect total d'un contrat de confiance direct entre les soignés et ceux à qui ils confient leur bien le plus précieux : leur peau. Ne pas respecter cette évidence, ou y porter atteinte de quelque façon que ce soit par des généralisations toujours injustes, des intrusions éthiquement abusives, c'est porter atteinte à un bien tellement subtil que personne n'est capable de le chiffrer ou même de le définir. Son nom (qui n'a rien à voir avec le respect formel de quelque règle ou protocole que ce soit), c'est le soin de la meilleure qualité possible.
Qu'est-ce que c'est que cette conscience qu'il faudrait restaurer ? Faut-il en chercher l'existence dans le passé ? L'aurions-nous perdue en route, comme André Maurois disait : «Il faut vous dire qu'à la suite d'une chute de cheval, j'ai perdu tout sens moral» ?
Peu de signes là encore d'une prise de conscience de ce que c'est vraiment que de soigner les autres. Exaltation permanente des vertus de l'organisation la plus scientifique possible dans le domaine de la pratique des soins : chacun prétend détenir le seul point de vue capable de fournir les fameux «résultats» attendus par les idolâtres des chiffres et des statistiques.
Une médecine privée qui se vide inexorablement de ses acteurs, une médecine publique qui attire de moins en moins les candidats, une université incapable de remplir sa mission de formation adaptée aux vrais besoins des nouvelles générations, une élite médicale inaudible, une recherche confidentielle, une presse scientifique francophone aux abonnés absents. Qui entend tout cela ? Où sont les prises de conscience de la réalité nationale globale ?
Sans cet effort, toutes les mesures pour revitaliser la médecine en France ne peuvent que créer de nouveaux déséquilibres. Qu'il faut ensuite, à grands frais, et souvent sans succès, tenter de réparer.
La compétence n'est pas la compétition. Nous avons heureusement perdu la prétention infantile de disposer de « la meilleure médecine du monde».
La compétence, c'est de faire le mieux possible ce que l'on a à faire. Avec toutes les limites qu'impose notre nature humaine, donc un certain droit à l'imperfection, et même à l'erreur. Le «zéro défaut» n'est pas de mise ici, peut-être serait-il bon que ce soit dit ouvertement.
La compétence n'est pas le résultat de la robotisation des comportements et des esprits. Aucun coaching, aucun «développement personnel» programmé ne peut y conduire.
Renforcer sa compétence au fil de sa vie, cela pourrait bien passer par la possibilité de fertiliser ce que l'on pense avoir appris de son métier par la culture d'autres sources d'enrichissement personnel. Pour cela deux ingrédients aussi rares que précieux, pour les soignants comme pour les autres. Disposer d'un minimum de temps pour soi, de temps vide que chacun remplit en toute liberté de choix.
Après ce bilan 2013, bonne nouvelle pour 2014, juste pour finir en beauté.
L'ennui n'est pas au programme : il y a encore plein de travail à faire pour améliorer la vie des humains de notre belle planète bleue.