DPC

Docteur François-Marie Michaut lui écrire

xxxAh, comme on les adore ces sigles. Après le CAPI si discutable et discuté jusqu’au sein du Conseil Constitutionnel , dont il faut d’urgence méditer la signification en italien de << il a compris >>, un petit nouveau nous est promis par le Ministère de la santé, selon le Quotidien du médecin du 16 septembre 2009. Il a pour nom DPC.
Si l’on veut << dépecer >> cet obscur acronyme, voici la clé officielle : développement professionnel continu.

xxxQue voilà un cousinage étrange avec ce fameux << développement personnel >> qui sert de paravent à de multiples officines aux motivations peu avouables. Il suffit de consulter n’importe quelle publication gratuite locale pour constater le succès commercial de ce concept pseudo psychologique fourre-tout, dépourvu de tout contenu scientifique, ou même simplement rationnel.
On ne peut en effet développer que ce qui est enveloppé, monsieur de la Palisse lui-même en eût convenu. Qui est assez savant, ou gravement ignorant, pour affirmer et imposer aux médecins en exercice ce qui doit être sorti de leur enveloppe personnelle afin d’en faire de meilleurs praticiens ? Prétendre en plus faire en sorte que ce processus suive une courbe ascendante constante, comme l’indique l’adjectif continu, tient du miracle absolu : aucune constante biologique ne répond à cette loi mathématique abstraite.

xxxx   Comme en plus, cette DPC, modèle remanié de la formation médicale post universitaire d’antan, sera rendue obligatoire, attend-t-on sérieusement que les praticiens y voient autre chose qu’une contrainte purement administrative supplémentaire, et fassent l’effort de participation et d’implication personnelle indispensable à n’importe quelle formation ?
Pour quelle mystérieuse raison la nation doit attendre que ses médecins soient déjà installés dans leurs cabinets privés ( les hospitaliers ne semblent pas concernés) pour se préoccuper de leur développement professionnel ? Faut-il en conclure que les jeunes diplômés frais émoulus de la vie hospitalière constituent un produit parfait et achevé, et que c’est leur solitude d’exercice qui les fait se recroqueviller professionnellement ? Non, ce n’est pas sérieux, n’importe quel jeune généraliste constate que ce qu’il a à faire n’a rien à voir avec ce qu’il a connu étant étudiant.
Alors, si l’on veut vraiment aider les médecins à pouvoir donner le meilleur d’eux-mêmes, c’est dès le début des études médicales au cours même de la sélection initiale qu’il faut agir en ce sens.

 xx   Comme il est gênant de se voir réduit à une abstraction totale !
Aucun d’entre nous ne ne sent être LE médecin. nous sommes tous si différents, et que ceux dans leur bureau qui en doutent prennent simplement la peine de lire les livres de Michael Balint pour comprendre un peu que ce qui est courant et facile dans un cabinet médical est impossible ou inconnu dans un autre.
Qu’ils se demandent un peu aussi pourquoi, pour la 619ème fois consécutive, nous démontrons ici sur cette LEM non seulement l’importance primordiale de << Renforcer la compétence >> qui est notre CPC exmédien, mais que cela ne peut se faire que quand on peut en même temps << Retrouver la confiance >> et << Restaurer la conscience>>. C’est notre ami Jacques Blais qui nous a indiqué cette triple voie. Ce sont tous nos amis et correspondants d’Exmed qui, sans se lasser, et de façon totalement bénévole, qui apportent chacun leur contribution pour qu’existe dans la réalité, même si c’est à petite échelle, un lieu accessible à tous pour donner à leur vie professionnelle aussi bien que privée la dose de piment nécessaire pour la rendre plus savoureuse.
Une fois de plus, on prend le problème à l’envers. Aveuglés par les brillants de la technoscience médicale, nous concentrons tous nos efforts sur les aspects strictement techniques et scientifiques de la médecine. L’idée simpliste et fausse en cours est que plus les médecins seront formés aux dernières nouveautés utilisées dans les soins de santé, meilleures et plus efficaces seront leurs interventions. Bien entendu, ces mises à jour, qui se font d’ailleurs largement d’elles mêmes au cours des contacts confraternels imposés par nos malades, et de notre volonté personnelle, de notre curiosité intellectuelle pour notre médecine, sont indispensables. Mais totalement insuffisantes pour vraiment améliorer la qualité des soins.
Comme dans les accidents d’avion ou d’automobile, la part de défaillance technique dans les ratés médicaux est très faible face aux insuffisances et dérapages de nos comportements humains.
Le noyau dur de la meilleure maîtrise des techniques médicales disponibles, avec toutes les incidences économiques que cela comporte, se trouve là.
Oui, c’est infiniment plus difficile, oui cela demande beaucoup plus de matière grise, et de moyens tout simplement humains, que ces plans de badigeonnage superficiel pompeusement nommés et déjà organisés administrativement comme s’ils étaient admissibles sans aucune discussion, ou tout simplement crédibles pour la communauté médicale.
Car c’est la personne toute entière des soignants, et non leur seule casquette médicale, qui est dans l’obligation de se mettre en question, tout simplement pour mieux vivre, et, hélas au sens propre, sans y laisser sa peau (1), leur métier si difficile. Dans cet espace intime, aucun pouvoir n’a le droit, ni, heureusement, le pouvoir de s’introduire.
 
  (1) F-M Michaut, Suicides médiatisés, site Exmed, Coup d’Oeil du 17 septembre 2009 . http://www.exmed.org/exmed/co2009c.html